L’appropriation culturelle, ça pique !

Pourquoi les tresses de Kylie Jenner posent-elles problème ? La semaine dernière, le média AJ+ tente de répondre à la question dans une vidéo publiée sur Facebook. Depuis, des milliers d’internautes se déchaînent : le débat va-t-il trop loin ?

En 2015, Kylie Jenner adopte les tresses plaquées. Crédit : Brian Prahl – Splash news

L’appropriation culturelle, on en parle quand une population « dominante » utilise les codes culturels d’un peuple « minoritaire ». Le concept vous paraît encore flou ? Pas étonnant, tellement le sujet est complexe. PressEyes le décortique pour vous.

Ce qui dérange

Le fantôme de l’époque coloniale. L’exemple le plus utilisé est celui des États-Unis et des Amérindiens. En 2012, Victoria’s Secret fait défiler une de ses mannequins en sous-vêtements, portant une grande coiffe indienne. Un simple « déguisement » diriez-vous, tant le costume plumé est vu et revu pour amuser la galerie en soirée. Mais, on peut imaginer le malaise si on regarde la scène à travers les yeux d’une population qui s’est faite décimer par le colonialisme… D’autant plus que la coiffe indienne est à l’origine un symbole sacré.

Autre hic : l’utilisation des codes culturels d’une population étrangère dans le but d’en tirer des bénéfices. Très clairement, quand Beyoncé se transforme en reine hindou dans le clip « Hymn for the weekend » de Coldplay, elle est accusée de s’approprier cette tradition en surfant sur le côté tendance du costume et des danses indiennes. De même pour Marc Jacobs en 2016 qui habille ses top modèles de grandes dreadlocks colorées. Un véritable scandale qui a enflammé la toile. Certains appelaient même au boycott de la marque. Pour mieux comprendre ce que revendique l’appropriation culturelle en général, posez vous cette question : comment je me sentirais, si quelqu’un piquait un style que j’ai inventé sans que je sois reconnu(e) ? On pourrait presque parler de plagiat.

Zoom sur l’appropriation culturelle noire

Vous vous demandez peut-être ce qu’ont à faire ici les tresses plaquées de Kylie Jenner. En fait, une partie de la population afro-américaine lui reproche d’imiter les femmes noires. Les dénonciations vont même plus loin avec le hashtag #lesblancheslefontmieux en 2015. Dans une vidéo publiée la même année, Amandla Stenberg, connue pour son rôle dans le film « Hunger Games », explique comment les blancs « ont adopté l’esprit afro » pour faire fortune dans le Hip Hop « sans jamais parler du racisme qui accompagne l’identité noire ». Dans les années 2000, Fergie ou encore Christina Aguilera s’affichent avec des nattes. En 2013, Miley Cyrus twerk entourée de femmes noires dans son clip « We won’t stop ». L’année d’après, Katy Perry porte une énorme perruque tressée et utilise l’argot afro pour son single « This is how we do », tout en mangeant une pastèque ou en affichant soudainement une photo d’Aretha Franklin.

Sur Youtube, Amandla Stenberg raconte que « l’appropriation se produit quand des privilégiés s’accaparent un style considéré comme cool ou amusant alors qu’il mène à des généralisations racistes ou à des stéréotypes ». Les fesses imposantes, le twerk, le vocabulaire urbain… Tous ces clichés sur la population noire sont repris par les stars blanches aux États-Unis, sans demander l’avis aux concernés. La jeune activiste termine sa vidéo en posant une question : « Que serait l’Amérique si on aimait les noirs autant qu’on aime leur culture ? ».

Soufflez, vous pouvez déculpabiliser

Alors non, ce n’est pas la peine de commencer à angoisser. Au premier abord, l’appropriation culturelle semble aller un peu trop loin, certes. Et si le sujet est compliqué, c’est tant mieux : vous pourrez méditer dessus longuement demain sur le chemin de votre cours de danse africaine, en mangeant des sushis ou en faisant du yoga ! Pour Amandla Stenberg, « l’appropriation se produit quand ceux qui sont mis en cause ne sont pas conscients de la culture à laquelle ils participent ». Le plus important c’est de savoir à qui appartient ces éléments culturels et de les respecter. Alors vive l’inspiration entre les cultures ! (Mais n’oubliez pas de créditer les sources).

Émilie Moulin