Julie Ricossé : « je fais ce métier parce que je ne peux pas m’en empêcher »

Julie Ricossé est un poisson dans l’eau depuis son enfance. Très tôt, elle nage dans les bas-fonds de la bande dessinée. Après avoir grandi sur un bateau, elle travaille pour la maison d’édition l’Atelier poisson soluble. Un signe du destin. D’origine nomade, elle ralentit et s’installe à Nice.

Morocco Jazz, le dernier projet sur lequel a travaillé Julie Ricossé © Glénat BD

Elle aime les histoires et le dessin. Elle a fait les Beaux-Arts de Marseille. A seulement 36 ans, Julie Ricossé a illustré une vingtaine de bandes dessinées et de livres. Pourtant, ce chiffre aurait pu être différent. Aujourd’hui, elle peut choisir ces projets en fonction de différents critères – ce qui n’a pas toujours été le cas. Elle préfère « un scénario bien structuré, des dialogues naturels, des personnages touchants et des rebondissements saisissants. » Ce qui ne court pas les rues selon la jeune femme.

Seulement, elle privilégie ses propres scénarios. Pour créer, elle s’inspire des gens qui l’entourent. « Une histoire doit être suffisamment riche, personnelle et intéressante », raconte Julie Ricossé à la rédaction de Press Eyes. Voilà pourquoi peu d’intrigues voient le jour. Le secret de la réussite, c’est d’y passer le plus de temps possible. Ce qui peut aussi s’avérer comme un inconvénient.

S’il faut être curieuse dans ce métier, selon Julie, un dessinateur ou une dessinatrice doit également être obstiné : « on passe des mois et des mois seule, il s’agit d’y croire et de pouvoir se détacher de son travail. » Le processus est long et répétitif. Alors, la jeune artiste ne faiblit pas et garde le sourire. Elle nous explique qu’il est nécessaire d’allier « implication » et « distance ».

Plus d’exemplaires mais moins de lecteurs, plus de passion moins de prétention

Quand on dit dessinateur ou scénariste de BD, vous pensez sûrement au cliché de l’artiste, un crayon à la main, un dans la bouche et l’autre derrière son oreille – placé probablement derrière son bureau ou sur son canapé, blotti à l’intérieur. Mais, cette image reste une idée reçue. C’est une profession difficile et dure à porter. Près de la moitié des auteurs vivent sous le SMIC. Un tiers sous le seuil de pauvreté. Des disparités accentuées chez les femmes.

Julie Ricossé ne se laisse pas décourager. En même temps, elle n’a pas le choix : « je fais ce métier parce que je ne peux pas m’en empêcher. » Elle ne cherche pas la reconnaissance. Elle souhaite juste donner du sens à sa vie, sous forme narrative. Et elle n’hésite pas à varier les styles. A l’école Emile Cohl, elle a appris à manier le fusain, le crayon et le pinceau. Elle est tentée par ce qu’elle ne sait pas encore faire.

© Facebook Julie Ricossé

Cette année, elle a publié « Morocco Jazz » – les souvenirs d’une vieille dame nommée Louise qui remontent aux années 50 à Casablanca transposée dans une bande dessinée colorée – avec la maison d’édition Glénat. Elle a aussi dessiné plusieurs couvertures pour “Nathan”, illustré cinq livres pour “Gallimard” et réalisé une BD de 120 pages avec “Sarbacane”. Si elle aime créer pour les adultes, elle n’hésite pas à se lancer dans les lectures “jeunesse”. Notamment avec « Le Moulin à paroles » écrit par Christos. D’après la trentenaire lumineuse, ce genre est plus « dynamique, visuel, humoristique, amusant, absurde et fantaisiste ». Julie se permet beaucoup plus de jeux de mots et d’humour. Un trait de caractère qu’elle préserve et nourrit depuis son enfance.

Aujourd’hui, Julie Ricossé continue de s’immerger dans sa passion, de mettre son masque de plongée et de dériver grâce au courant tumultueux de la vie. Elle sortira une nouvelle BD en collaboration avec Estelle Dumas, chez Futuropolis en 2019. Vous pouvez aussi la retrouver lors du Festival de la Bulle d’Or ce week-end !

Marie Boetti

Source Photo : Marie Boetti