Cindy et Rémy, deux artistes en quête du bonheur au cœur du Sénégal

Cindy Spanu Rajaona, professeur de danse à Carcassonne, et son mari Rémy Rajaona aka Méro Raja, artiste peintre, se sont rendus au Sénégal pour initier les enfants à l’art …

L’association M’Boro pour redonner le sourire aux Sénégalais

Il y a deux ans, Rémy est contacté par l’association M’Boro à Toulouse,  pour réaliser un live painting lors du concert annuel organisé pour la levée de fond. « Aujourd’hui ça fait deux ans que je réponds présent à cette soirée. C’est là que nous avons fait la démarche mon épouse et moi de leur proposer notre présence lors de la mission au Sénégal. »

M’Boro a été créé il y a 7 ans, autour de 3 audioprothésistes dont Thibault Dumoulin, le président actuel désireux d’être au cœur de l’humanitaire. Une association qui, au départ, aider uniquement les personnes sourdes ou mal-entendantes à s’appareiller. Mais ses membres ne voulaient pas en rester là et ont cherché à se développer. De rencontre en rencontre, ils ont fini par tomber sur Gaby, une humanitaire suisse qui s’investit depuis 20 ans à M’boro (un village sénégalais) chez Aprosem Pro Senégal (association sénégalaise pour le développement social médical éducatif et culturel). Aujourd’hui,  Humanitaire M’Boro se diversifie et propose chaque année des nouveautés comme en 2017 : mettre à l’œuvre l’art …

Du street art à la danse

« Quand nous avons proposé à Thibault Dumoulin de partir avec eux, il n’avait jamais envisagé de se tourner en direction d’un versant culturel. Il a été emballé par l’idée. Puis, nous voilà partis en octobre dernier sur les routes du Sénégal », confie Cindy.

Ils sont au total 18 à partir pour redonner le sourire aux Sénégalais…

Le directeur de M’Boro laisse carte blanche à Méro et Cindy – n’ayant aucune expérience en l’art. Pour lui, c’était une évidence. Les deux artistes devaient faire partie de cette aventure. Ils apportent une véritable valeur à ce voyage. « Nous avons donc réfléchi ensemble à ce que serait notre mission. Sur place, le directeur du centre où nous sommes intervenus avait anticipé notre venue et avait mis en place des ateliers arts scéniques et des dessins en prévision », raconte la jeune humanitaire.

La danseuse et l’artiste-peintre se sont initiés auprès d’enfants. D’abord, le couple fréquente un centre d’intégration communautaire créé et géré par Aprosem dans le village. « Mon projet était de faire découvrir à ces enfants la danse contemporaine et de les mettre en situation de représentation lors d’un spectacle ». Quant à Rémy, il avait «  pour projet de leur faire apprendre le graffiti et qu’ils puissent réaliser une fresque murale dans le village ».

 

Le vivre ensemble

Tous les deux avancent donc vers l’inconnu.  Une première qui les oblige à s’adapter en fonction de chaque situation. Tous les après-midis, ils se rendent auprès de deux groupes d’enfants sélectionnés à l’avance par Ndjouga, le directeur du centre. « Le matin, nous avons réalisé la fresque sur le mur du centre. Nous avons aussi improvisé une sorte de centre aéré avec un atelier dessin pour les enfants qui n’étaient pas à l’école et qui passaient leur temps dans la rue à nous regarder peindre », explique Rémy.

Cindy, de son côté, donne des ateliers de danse contemporaine. Son objectif ? La présentation d’une chorégraphie à la fin de la mission avec 12 élèves. «  Tous n’ont malheureusement pas pu être là le jour du spectacle, retenus pour aider leurs parents à travailler ». Autrefois assistante sociale, la jeune danseuse a pu donc mettre en action cette voie professionnelle au-delà de la transmission artistique. «  Je me suis rendue compte que la place de l’enfant et l’estime de soi sont deux points importants à faire évoluer. Il s’agit d’une éducation de masse où l’enfant n’a pas réellement de place comme individu propre et les rapports entre eux sont fortement emprunts d’agressivité ». Pour la jeune femme, il était indispensable de travailler avec eux sur cette relation de confiance,  un élément essentiel au sein d’un groupe de danseurs. Mais aussi, «  sur le contact dans la bienveillance que la danse contemporaine nous permet d’expérimenter ».

De belles initiatives de la part des jeunes artistes,  qui se sont nourris de leur expérience pour apporter de la solidarité et de l’amour envers ses enfants souvent seul sans vraiment de repère affectif…

« L’art est une affaire de sensations »

Travailler avec des enfants dont la culture est différente de celle que l’on retrouve en France. Des enfants déscolarisés,  parlant pour la plupart seulement le Wollof, n’a à aucun moment freiné Cindy et Rémy qui s’investissent corps et âme à ce beau projet artistique. «  Des élèves restent des élèves, des enfants restent des enfants même au bout du monde », confie Cindy. « Je pense que l’art est une affaire de sensations et d’émotions, peu importe où tu te trouves dans le monde cela peut toucher tout un chacun », ajoute-t-elle.

Un rapport qu’ils avouent tout de même différent à celui d’un public français. En effet,  ces jeunes Sénégalais ne connaissaient jusque-là rien sur la  signification de l’art urbain ou de la danse contemporaine. Mais c’était leur mission,  rendre des enfants heureux par de belles découvertes. « Le contexte était pour nous, en tant que personnes artistiques, vraiment fabuleux. Pourvoir exprimer son art si loin de chez soi auprès d’une population ayant une  tout autre culture c’est une véritable chance ! C’est enrichissant et jubilatoire », s’enthousiasme Rémy.

 

Humainement enrichie

S’ils ont enrichi le savoir des Sénégalais, ces derniers ont en retour enrichi la vie de Cindy et Méro : « Humainement c’est fou, c’est difficile à exprimer car je pense qu’il faut le vivre pour le comprendre. On a du mal à poser des mots sur nos sensations mais nous avons tissés des liens forts que ce soit avec les enfants ou avec les Sénégalais adultes qui ont travaillé avec nous ou qui nous ont accueillies ».

«  Même si nous avons beaucoup travaillé, nous sommes revenus ressourcés et pas fatigués. Nous avons vécu au rythme du soleil, déconnecté du virtuel. Des échanges verbaux autour de différents sujets comme la vision de la vie, de la religion et de la politique. Il y avait une ambiance incroyable avec les autres membres de la mission », décrit Rémy.

Des soirées qu’ils passeront au clair de lune, au son des percussions et des chants en Wollof. Mais aussi, ce bien-être en eux, de se sentir utile et redonner de la joie à des enfants qui se contentent de peu. « Un tout qui nous marquera et nous impactera forcément par la suite », confie Rémy.

Ce n’est pas fini !

Les deux tourtereaux ne s’arrêtent pas juste à une seule initiation dans l’humanitaire ! Ils ont à nouveau signé pour un tour l’année prochaine. Une vision plus longue de leur action et plus juste dans l’élaboration de leur projet. «  Par l’art, l’idée est d’aller chercher l’humain et essayer d’agir auprès de lui », explique Cindy. S’ils aimeraient partager leur savoir dans d’autres pays, il restent pour le moment dans la sage idée d’approfondir leurs connaissances au sein du Sénégal grâce à l’association M’boro.

De retour en France, le professeur de danse a parlé de cette rencontre à ses petits danseurs. Elle a essayé de les sensibiliser afin de leur faire prendre conscience de la chance qu’ils ont de pouvoir aller à l’école, apprendre ce qu’ils ont envie et avoir tout le confort nécessaire. Des choses que les petites Sénégalais eux n’ont pas …  Et pourtant  une roue et un bâton leur suffisent pour être heureux. « Ce voyage n’a fait que confirmer ma façon de transmettre en m’appuyant sur l’éducation positive, par le plaisir, la motivation et non par l’autoritarisme. Pour mon prochain voyage, j’espère avoir la chance d’apprendre la danse africaine et voir comment cela pourrait nourrir ma danse. »

Méro, lui, nous prépare une belle surprise avec une série de portraits à partir de photos prises au Sénégal !

Mathilde Dandeu

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