« The Basketball Diaries » : le plaisir des enfers

Réalisé en 1995, « The Basketball Diaries » raconte l’histoire de Jim Carroll, un jeune homme plein de vie qui rêve de devenir basketteur. Interprété par Leonardo DiCaprio, le lycéen succombe un soir à la prise de stupéfiants… 

Prendre une petite dose de cocaïne, un soupçon d’héroïne « juste le samedi, puis le mardi », tomber dans ce cercle vicieux et devenir accro à la drogue… Tel est l’enfer de Jim Carroll, le narrateur du film « The Basketball Diaries ». Interprété par Leonardo DiCaprio, ce jeune lycéen est scolarisé dans une école catholique, avec ses trois meilleurs amis Mickey (Mark Wahlberh), Pedro (James Madio), Neutron (Patrick McGaw), passionnés de basket. Leur rêve ? Devenir des grandes stars de la NBA. Comme tous les jeunes, ils essaient quelques drogues, pour le « fun ». Mais le « fun » peut vite devenir dangereux pour les plus faibles face à l’accoutumance. Très vite, leur désir de notoriété est oublié. Ils laissent place à la déchéance d’une vie ancrée dans la « défonce ». 

L’insouciance oubliée 

Tout au long du long-métrage, le spectateur est témoin du purgatoire de Jim face à son addiction. Les premières scènes montre une bande de copains heureux de vivre. Ils aiment se retrouver après les cours, pour fumer un peu, boire… Jim aime écrire dans son journal intime et invite le spectateur dans ses confessions. Un lien permettant de se rapprocher du personnage. On sait ce qu’il ressent chaque jour et ce qu’il se passe dans la tête de ce garçon de 13 ans…

https://www.instagram.com/p/B-ino0WnI86/

Très vite, la bande est confrontée à la mort. Celle de Bobby, l’un de leurs meilleurs amis qui succombe à une leucémie. Pour eux, plus rien ne sera comme avant. Face à cette incompréhension, ils décident de profiter de la vie, de chaque instant et de tout ce qu’elle a à leur offrir.

Jim connaît les « joies » des stupéfiants lors d’une surprise organisée par Neutron. Il l’amène dans un appartement où deux jeunes filles les attendent pour répondre à « leurs envies d’ homme ». L’une d’elle propose à Jim un mélange, lui promettant performance. Leurs ébats sexuels finis, l’écolière dort paisiblement. La caméra parcourt le lit, jusqu’à trouver Jim. Assis à côté d’elle, il écrit sur son journal. Il renifle, il est agité, il continue à prendre ce savoureux mélange. Peu à peu, la lumière blanche et pure qui l’éclaire devient rouge flamboyante, à l’image des flammes de l’enfer.  La dose terminée, il se lève pour chercher ce qu’il y a de bon à prendre. La caméra zoom sur ce visage, autrefois pâle, devenu grisâtre, empli de tics, aux yeux macabres et cernés. Le spectateur comprend que ce plaisir d’un soir va devenir un long combat. 

Plaisir mortel 

C’est à partir de ce moment, que le vie de Jim va rimer avec le mot « défonce », « cachets », « drogues », « héroïne ». Du terrain de basket, il passe au terrain des dealers. Sa mère ne le reconnaît plus. Impuissante, elle le met à la porte. Ses professeurs et le directeur le virent. Conscient de ce qu’il vit, ils ne cherchent pas à l’aider, mais préfère s’en débarrasser.

https://www.instagram.com/p/B-CrgTZJCIr/

Jim se retrouve à la rue et vit avec ses amis toxicomanes dans un sous-sol. Rien n’est laissé au hasard… Leonardo DiCaprio n’est pas là pour être sublimé, mais pour montrer la réalité : les conséquences de la drogue sur le corps, sur le mental. On le voit en plein « bad trip », il vomit à cause des surdoses ou encore bave à cause du manque : « On a le nez qui coule, des crampes d’estomac, les jambes en coton, comme si on avait fait six matchs à la suite et on entend toujours la même voix, encore une fois, plus qu’une fois… Et on arrête… ». Mais tant que nous n’avons pas l’aide nécessaire, on n’arrête jamais… On continue chaque jour un peu plus. De la simple prise par voix nasale, le personnage en vient à se faire couler sa « douceur » par les veines. L’argent et la dose manquent, son corps souffre. Il vole pour subvenir à la satiété de son cerveau qui ne vit que par cette addiction. Les besoins sont de plus en plus urgents, voler ne suffit plus… Jim tombe dans la prostitution pour se payer quelques grammes de « bonheur ». La mort est proche, elle le frôle… 

De l’exclusion sociale à la perte de son corps

Tirée de l’autobiographie de Jim Carroll, « The Basketball Diaries » n’est pas un film à prendre à la légère, ni pour passer le temps ou encore se divertir. Il est un point d’exclamation sur la dangerosité de la drogue. Un rôle qui n’est pas facile et pourtant Leonardo DiCaprio l’endosse avec justesse. Le spectateur voit face à lui un toxicomane. Son visage se décompose au fur et à mesure, sa silhouette devient peu à peu l’ombre d’elle-même. Il n’est plus qu’un fantôme qui erre dans les rues à la poursuite du brasier. Nombreux sont les films révélant les effets de la drogue  : exclusion sociale , vol… Mais il y a toujours une connotation positive avec des personnages qui prennent plaisir à en prendre. On les voit s’évader le temps d’une soirée, sans de réelles conséquences physiques le lendemain… 

https://www.instagram.com/p/B-WaCI9pLCH/

Dans « The Basketball Diaries », le positif est loin de prendre le dessus sur le négatif. Leonardo DiCaprio souligne la gravité psychologique et physique. On le voit baigner dans son vomi, avec des vêtements sales… Jusqu’à cette scène où un ami tente de le sevrer. L’acteur nous inclut dans la souffrance de cette désaccoutumance. Replié sur lui-même, il est couvert de bave… Le spectateur est face à la réalité. « The Basketball Diaries », pousse à se demander : quel plaisir y a t-il à se droguer ? Quel en est l’intérêt ?

Le film fait oublier cette idée positive que se font les jeunes de la drogue. Celle de la défonce festive et joyeuse ! Il faut être conscient, qu’il n’a rien de positif dans la drogue et qu’elle vous détruit à petit feu. Nombreux sont ceux qui essaient, qui ont essayé et qui continuent à en prendre de temps en temps. Comme le dit le narrateur, nous sommes tous différents vis-à-vis de la drogue, que ce soit par rapport à sa condition sociale ou à ce grand plongeon vers l’addiction. D’autres auront de la chance de ne jamais s’y accoutumer  : «  Ce qu’il faut savoir c’est qu’il y a plusieurs types de toxicomanes. Il y a les gosses de riches, les dilettants, qui y touchent du bout des doigts, qui ont toujours assez de pognon pour filer sur la rivière H à chaque fois qu’ils ont dépassé les bornes et qu’ils crèvent de peur. Les autres junkies les supportent mal, mais ce sont des acheteurs, le pognon les rend plus tolérables. Il y a aussi les petits bourgeois, les coincés, genre BCBG, ils appartiennent à la même catégorie, mais eux ils ouvrent les yeux de papa et maman à la réalité sociale, à son virus, et en plus ils poussent le gouvernement à agir au lieu de parler. Et il y a nous, les gosses des rues. Et on se défonce de plus en plus jeune autour de 13 ans. On croit que l’on contrôle la situation, que l’on ne deviendra pas accro, en général on se plante. J’en suis la preuve vivante. Mais en fin de compte, il suffit de se dire que le Junky fait aussi ses huit heures par jour sauf qu’elles le conduisent le plus souvent vers les ténèbres ».

Renaître de ses démons 

Une fin qui donne de l’espoir pour toutes ces personnes qui se sont perdues. Jim Carroll s’en sort grâce à l’écriture et plus particulièrement à la littérature. La lumière obscure qui nous accompagne tout le long du film devient à nouveau un faisceau pure illuminant la renaissance de son visage. 

Un film qui devrait être mis en avant par les gouvernements. Une histoire qui pourrait faire prendre conscience aux plus jeunes que se droguer n’est pas un jeu, quelque chose de cool en soirée. Il serait nécessaire que « The Basketball Diaries » soit l’objet d’une véritable étude dans les collèges et les lycées pour faire réfléchir les plus faibles ou les plus curieux afin de les dissuader de goûter à ce mets funeste. 

Selon un rapport de 2019 réalisé par l’Académie nationale de la médecine, la France compte 130 000 décès annuels liés aux drogues licites (tabac, alcool) et illicites (cocaïne, cannabis…), soit 355 morts par jour ! 

En France, une liste répertoriant 200 drogues interdites a été créée. Cette dernière est gérée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et le Ministère de la Santé. 

Aux Etats-Unis, la drogue fait plus de décès que les accidents de la route. En 2017, ce sont 70 000 décès dus à la surconsommation de médicaments analgésiques provoquant des chutes, des noyades ou encore des incendies. Un américain avait un risque sur 103 de mourir d’un accident de la route, un sur 114 de faire une chute mortelle et un sur 96 de décéder des suites d’une overdose. Un pays dans lequel les opioïdes, autorisés ou interdits, représentent environ 60% des cas de surconsommation fatale. Les drogues illicites aux Etats-Unis tuent 130 personnes par jour. Un fléau qui fait baisser l’espérance de vie des Américains.

Certains plaisirs ont un prix… celle de la mort.