“Toujours là pour toi” ou la glorification d’une amitié toxique

Toujours là pour toi
Toujours là pour toi ©Netflix

Dans le Top 10 Netflix France depuis sa mise en ligne, la série Toujours là pour toi cartonne sur la plateforme de streaming. Mais vaut-elle vraiment le coup d’oeil ?

Jusqu’où irions-nous par amitié ? Oui, par amitié et non pas par amour, comme on se le demande toujours. Cette question revient inlassablement à l’esprit, à chaque épisode de Toujours là pour toi  ( Firefly Flane en version originale, du titre du roman américain dont la série est adaptée) .

Sur le papier, cette nouvelle production Netflix a tout pour plaire. Un duo féminin drôle, touchant à la fois puissant et incandescent (comme celui, mythique, porté par Thelma et Louise).

L’histoire suit les pas de Kate (Sarah Chalke) et Tully (Katherine Heigl), deux meilleures amies à la vie, à la mort, de l’adolescence jusqu’à la quarantaine et pourtant si différentes : Kate, la timide blonde pas très sûre d’elle, et de l’autre Tully, la pétillante brune au caractère bien trempé.

Un duo presque idéalisé qui fait rêver et conforte le spectateur à se dire que les différences rapprochent.

Une série feel good sur trois décennies

Les dix épisodes se regardent avec un facilité déconcertante.
Toujours là pour toi  tient en effet toutes ses promesses de série feel good : deux actrices au charme fou pour incarner Kate ( Roan Curtis ) et Tully (Alissa Skovbye) version adolescente de 15 ans. Elles nous plongent dans les années seventies ultra hippies avec leur phare à paupières bleu fluo et jupes à franges, avant que Sarah Chalke et Katherine Heigl ne prennent le relais, dès la vingtaine, avec leur brushing XXL et leurs robes à froufrou.

Côté nostalgie, la créatrice Maggie Friedman s’est fait plaisir. La série est rythmée par de nombreux feed back permettant de voir évoluer les personnages, mais aussi de comprendre leurs blessures.

 
 
 
 
 
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On retrouve ainsi nos deux meilleures copines, vingt ans plus tard, un peu abîmées par la vie mais toujours aussi attachantes, l’une au bord du divorce et l’autre célibataire endurcie, présentatrice star d’un talk show à la Ellen DeGeneres.

Au fil des épisodes le spectateur prend conscience que cette amitié si parfaite est finalement une amitié toxique dans laquelle Kate est la première victime.

De l’adolescence à l’âge adulte elle est condamnée à vivre éternellement dans l’ombre de Tully, la star du show, celle dont tout le monde se soucie en permanence, celle qui concentre toute l’attention.

Par son égo Tully ne prête pas attention à sa meilleure amie sans cesse mise de côté. Un mépris qui remonte à leur adolescence.

Dès sa rencontre avec Tully, Kate, alors âgée de 15 ans, s’efface et se montre prête à tous les sacrifices pour son amie.

Kate, une personnage éternellement dans l’ombre de Tully

Nous pouvions naïvement penser que cette situation allait évoluer. Après tout, il y avait bien de quoi plaindre Tully, livrée à elle-même, obligée de vivre sous le même toit que sa mère toxicomane délaissant complètement sa fille.

Kate aurait pu être présente pour souligner les traumas de Tully par contraste avec sa vie de famille si stable et si parfaite. Mais l’adolescente, la femme s’efface à la vue de Tully pour être à son écoute et subit toutes ses attitudes sans jamais dire un mot.

Elle ira même accepter que sa meilleure amie couche avec l’homme qu’elle aime.

Alors oui, Kate à sa petite revanche et finit par épouser le beau Johnny (Ben Lawson), mais au prix de combien d’années d’attente et de souffrance ?

Une fois de plus Tully n’est jamais loin dans leur relation. Un mariage et une pré-ado, quelques années plus tard, Kate s’avouera qu’elle était le deuxième choix de son mari après sa meilleure amie.

Obnubilée par sa réussite professionnelle, cette dernière se fiche éperdument des sentiments de Kate. Pourquoi le ferait-elle puisque qu’elle sait qu’elle sera toujours là pour elle.

La glorification par la série de cette relation toxique est terriblement gênante, fatigante…

L’afflux des sujets

Au-delà de cette relation toxique, la série aborde de nombreux sujets importants à travers chacune des périodes : le viol et l’homosexualité par le biais du frère de Kate dans les années 70 qui finira par épouser une femme pour enterrer son secret. Le harcèlement sexuel, la fausse couche dans les années 2000. Des périodes où tous ces faits, étaient tabous. On devait se cacher, ne rien dire, la société faisait même de nous des personnes honteuses.

Des thématiques primordiales et pourtant elles sont apportées de manière assez superficielle.

La fausse couche Tully est abordée sans aucune subtilité :  elle arrive sur le plateau de télé en donnant la parole aux femmes dans le public qui ont vécu la même chose. Elle se sert de sa notoriété pour faire parler ces femmes qui se sentent presque dans l’obligation d’avouer publiquement leur fausse couche sans en être préparée.

Le harcèlement sexuel nous tombe également en plein visage, un passage qui ne dure que quelques secondes. Encore une fois c’est Tully qui en est victime… ce qui en devient un peu barbant. On pousse le spectateur a accepté ce qu’elle fait endurer à Kate, elle qui n’a jamais rien vécu de dramatique.

De la femme forte, Tully est peu à peu dépeinte comme une victime, une femme qui n’arrive pas se reconstruire et fait payer son sort à sa meilleure amie.

La série révèle peut-être trop de sujet d’actualité pour finalement ne parler de rien et les survoler.

On ne vous déconseille pas de regarder Toujours là pour toi car la série reste un bon divertissement, parfait pour les soirs d’hiver passés sous la couette.