Barbara Cabrita la perfectionniste

Barbara Cabrita, comédienne, actrice, Poulets grillés, PressEyes, Mathilde Dandeu

Crédit photo : Martin Lagardère

Comédienne discrète Barbara Cabrita a su s’imposer au coeur du cinéma et de la télévision française. Depuis plus de vingt ans, elle enchaîne les rôles qui la dévoilent mystérieuse, amoureuse ou drôle. Récemment, elle s’est illustrée dans “Sam”, sur TF1, désormais on la retrouve sur France 3 dans “Poulets grillés” avant de porter toute notre attention sur la saison 2 d’”Escape” sur W9. Pour PressEyes, elle s’est confiée. 

Même en vacances, Barbara Cabrita ne peut s’empêcher de répondre aux exigences qu’est d’être une artiste. Elle prend le temps de se replonger dans ses souvenirs pour répondre à mes questions. J’espère seulement qu’elle ne m’en voudra pas trop, de l’avoir embêté lors de ces quelques jours loin de toute agitation des plateaux de tournage. 

Son premier souvenir remonte il y a vingt ans, lorsqu’elle débute en tant que comédienne. Un métier qu’elle n’a pas vraiment choisi et s’en est voulu pendant quelque temps. L’actrice avait cette impression de prendre la place de quelqu’un “qui en avait vraiment envie“. Adolescente, sa mère envoie des photos d’elle à une agence de modèle. Très vite, Barbara Cabrita est repérée. La jeune fille au regard ténébreux et à la belle chevelure bouclée ne passe pas inaperçue. “Cette agence s’appelle frimousse, elle existe toujours et je l’adore. J’ai fait des tournages, mais je ne me suis jamais dit que ça allait être ma passion, ni mon métier, ce n’était pas moi.” Discrète, elle n’aime pas vraiment être le centre de l’attention. En parallèle du théâtre, elle suit des cours à la fac de psycho, puis elle passe une licence d’anthropologie. C’est au bout de dix ans de tournage et quatre années au sein de l’actors studio, qu’elle se résigne à ce destin qui lui a été presque “imposé“, devenu au fil du temps une vocation. “En voyageant entre les tournages, j’ai vu qu’il y avait une palette assez large dans la manière de travailler. La rencontre avec les autres, avec les équipes, avec les techniciens, avec les comédiens ça me plaisait beaucoup, de rencontrer des personnalités différentes. Et puis les nombreux endroits auxquels on a accès qui sont fermés aux public, on est très privilégiés pour ça. C’est une chose que l’on a rarement l’occasion de faire dans un autre métier.

Au coeur du réel 

Barbara Cabrita s’investit à 100% dans chacun de ses rôles. Elle a cette soif de découverte et d’apprentissage. Pour cela, elle n’hésite pas à se confronter directement au milieu de son personnage, comme pour l’Héritage sur France 3, où elle incarnait une ostréicultrice : “Je suis allée voir un ostréiculteur à Mèze sur l’étang de Thau, là ou j’habitais, qui m’a énormément aidé. C’était drôle, parce qu’il m’a vraiment ouvert les portes de son domaine et m’a emmené sur son bateau pour me montrer son travail sans me connaître, il était hyper gentil.” Cette quête du personnage, en s’immisçant dans les coulisses de différentes professions, est une facette du métier d’actrice qui plaît à Barbara Cabrita. Elle s’en sort parfois plus grandie même si parfois il faut tout reprendre à zéro : “Ce qui a été drôle à ce moment-là, c’est que les ostréiculteurs du bassin d’Arcachon, là ou je tournais, n’ont pas du tout la même manière de travailler que ceux de l’étang de Thau.” La comédienne se retrouve avec les bases différentes et a dû à nouveau être épaulée. Positive, elle ne prend pas cette expérience comme une perte de temps. Bien au contraire, elle lui fait prendre conscience qu’il y a plusieurs manières d’aborder la profession de son personnage. S’introduire dans le quotidien de ces personnes c’est aussi faire de belles rencontres qui en découlent parfois à de belles amitiés :  “Pour la série H24 sur TF1, avec Anne Parillaud, Florence Coste et Frédérique Bel on est allées aux urgences de l’hôpital d’Aulnay-sous-Bois. On a été chaperonnées par une médecin qui est incroyable et qui est devenue une amie.” Des moments inoubliables, qui sont aussi pour la comédienne des idées de reconversion professionnelle : “Je me dis que si demain je suis ostréicultrice, je serais très heureuse. Ça m’ouvre aussi des portes à d’autres métiers pour plus tard (rire).” 

 

 
 
 
 
 
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Malheureusement, les séries ou les films ont souvent des temps impartis, ce qui ne lui laisse pas toujours l’occasion d’aller en profondeur dans ses recherches, mais l’oblige à travailler autrement. 

Barbara Cabrita la studieuse 

Barbara prend le temps de se poser les bonnes questions vis-à-vis de son personnage : “Je me dis comment moi je réagirais en fonction de l’individualité du personnage. En revanche, je cherche  toujours quelque chose qui ne m’appartient pas et c’est assez périlleux, parce que l’on joue avec ce que l’on ressent.” L’actrice est convaincue que les rôles que l’on propose aux comédiens sont une partie d’eux même. Un constat qu’elle a pu faire dans sa propre évolution : “Pendant des années, je jouais des flics avec une sorte de noirceur, de violence… C’est ce que je portais vraiment en moi. Aujourd’hui, je me rends compte qu’il y a plus de douceur dans les personnages que l’on me propose, plus d’apaisement. C’est une part de nous-même inconsciente qui joue. Par contre, la construction d’un personnage est un travail conscient que je fais en amont que l’on appelle la continuité du personnage.” Barbara Cabrita est une bosseuse. Elle rigole en disant qu’elle est très scolaire, mais c’est pour elle indispensable pour se repérer dans l’espace temps du tournage, dont les scènes ne sont jamais tournées dans l’ordre. “C’est un travail mental pour libérer le jour du tournage toute l’émotion. En amont, j’écris un résumé de mon personnage dans toutes les scènes. J’ai créé un code couleur et selon l’évolution, il y a du rouge, du rose… Je sais au moment quand je tourne mon cahier ce que ça veut dire.” Qui a dit qu’être actrice était un métier simple ? 

 

 
 
 
 
 
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Mais au-delà de ces petits devoirs qu’elle se donne sur le plateau de tournage, Barbara Cabrita se laisse guider par le moment présent et ce qu’elle ressent. “C’est la magie, vous devez être naturelle en répétant 20 fois les mêmes choses, en faisant 20 fois les mêmes gestes. Il faut trouver l’instantanéité et la fraîcheur à chaque fois, comme dans la vie. On ne sait pas ce qu’il va se passer après, mais on sait ce qu’il s’est passé avant.” Cette spontanéité du moment doit tout de même être en adéquation avec le rôle. La comédienne doit alors faire abstraction de ses propres sentiments, de sa propre humeur et de sa vie privée : “Tout se regroupe dans ce moment-là. Vous devez être dans une concentration, une efficience et une efficacité  très rigoureuse.” Toutefois, la comédienne peut se servir de son vécu et l’apporter à ses personnages, lui permettant de passer d’un genre à un autre sans se sentir perdue. 

Pour ce qui est des thrillers ou du drame, Barbara Cabrita se confronte à ses périodes compliquées pour donner une vérité à ses personnages : “La noirceur je la connais, je l’ai vécu, je l’ai expérimenté de manière privée comme tout le monde. Je ne pense pas qu’il n’y ait personne dans ce monde qui n’ait pas touché du doigt au moins une fois dans sa vie à des souffrances ou des douleurs, à plus ou moins grande échelle.” Mais ce qui lui plaît va encore plus loin, en ne cherchant pas seulement à incarner un personnage en souffrance. Elle veut montrer à son public que les drames, les difficultés, le deuil, la maladie… tout est surmontable et que l’on peut guérir de ses blessures. “On a les capacités en tant qu’être humain de transcender les choses que l’on ne soupçonne pas. C’est ça qui m’importait dans le personnage de Félicia dans ‘Sam’. C’est un personnage qui a vécu la mort de son père et d’autres choses, mais qui ne va pas trimbaler sa croix, qui ne va pas devenir pathos ou revancharde, parce qu’elle a guéri de ça ou en partie et c’est possible. On sent quand même qu’elle a des fêlures, mais elle a choisi le côté lumineux.” L’actrice tend à mettre l’accent que dans le noir il y a toujours de la lumière et inversement. “Les univers se mélangent, on passe d’un tournage à un autre, mais finalement il y a toujours un fil conducteur. Et puis quand on passe du drame à la comédie c’est quand même une bonne respiration, je trouverais dommage de faire que des trucs noirs.

Récemment, c’est bien dans des univers complètement différents dans lesquels l’actrice s’est illustrée, dans “Poulets grillés”, “Sam” ou encore dans la saison 2 d’ “Escape”.

Rire et s’amuser 

Adapté du roman de Sophie Hénnaf, “Poulets grillés” diffusé sur France 3 est l’histoire d’une commandante, incarnée par Barbara Cabrita, qui mise à pied, se voit reprendre la tête de la 4e brigade, là où l’État envoie tous les flics dont on ne sait plus quoi en faire. “On y retrouve des flics dépressifs, autistes, alcooliques… et je joue cette commandante qui prend la tête de cette brigade loufoque.” Un tournage qu’elle décrit comme super, de par la force du scénario : “C’est vraiment fort à arriver à une enquête, une investigation, menée par des flics qui n’ont pas un raisonnement logique. Il y a des réflexions complètement à côté de la plaque , certains sont lunaires…” Des personnages aux personnalités décalées, emplis d’humour, mais aussi de tendresse : “On passe d’une émotion très douce et très tendre à une absurdité totale et c’est très bien réalisé.” Une série qui à tous les égards est politiquement incorrecte et se moque avec dérision de l’univers policier. Barbara Cabrita tient à rassurer : “Il y a quand même ce respect de la hiérarchie et du cadre.

 

 
 
 
 
 
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En début d’année, Barbara Cabrita a rejoint le casting de la saison 6 de “Sam”. Elle y joue Félicia, professeur de mathématiques. Un personnage, qui dès les premiers épisodes a une belle évolution. Au départ, Félicia est très solaire, dans sa bulle… Mais ce grain de folie laisse place à la lucidité. Elle devient celle qui a le plus la tête sur les épaules, pour petit à petit, révéler une facette plus secrète. En effet, on apprend que Félicia a perdu son père et si elle se montre toujours très gentille avec sa mère, on comprend rapidement qu’elle fait des choix à son encontre pour mieux l’atteindre. “C’était important qu’elle ne soit pas seulement une fée, la fée Félicia qui a tout résolu. Il fallait qu’il y ait cette confrontation, car elle a des failles.“ Malgré ces souffrances, Barbara Cabrita ne voulait pas en faire un personnage revanchard. Ainsi, dès qu’elle va trop loin, le téléspectateur la voit s’en vouloir et ressentir des remords. Un duo mère/fille qu’elle partage avec la grande Chantal Ladesou, qui visiblement culpabilisait de ne pas être toujours sympathique avec sa fille fictive : “C’était très drôle parce que Chantal n’en revenait pas de sa rigidité, elle disait : “Non je ne peux pas faire ça” et je lui disais : ‘Vas-y soit odieuse avec moi, tout ira bien’. Elle avait quelque fois un peu de peine et c’était mignon à voir.” Pourtant, à l’écran tout n’était qu’authentique, révélant les prouesses des comédiennes qui ont un rôle majeur dans cette sixième saison. 

Pour ce qui est de l’idée de rendre hommage aux femmes dans “Sam”, Barbara ne qualifierait pas cela d’hommage :  “Il y a des femmes dans cette série, certes, mais il ne faut pas jeter un sort sur le sujet, c’est simplement la vie et cette série montre une diversité de femmes. Mettre trop en avant le fait qu’il y ait de nombreux personnages féminins à l’écran où derrière la caméra, ou à d’autres postes, voudrait signifier que c’est rare, mais justement, il faut rendre ça anodin et aux côtés des hommes.  Pour moi le féminisme c’est ça.

Elle qualifie “Sam” comme une série qui met tout simplement en avant plusieurs visages féminins, avec ce qu’elles apportent aux unes et aux autres avec des thèmes importants : le choix de disposer de son corps comme on le souhaite par le biais de la maternité, la perte d’un mari et d’un père, l’ambition de construire son propre empire, l’homosexualité… Barbara Cabrita n’en oublie pas pour autant la sensibilité des hommes : “Le personnage de Fred a cette sensibilité féminine et celui de Thierry Neuvic apporte beaucoup de douceur et de respect. C’est une série très subtile avec des valeurs très intéressantes.

Une discussion qui se termine sur cette belle observation. Tient, observation, un nom féminin, qui pourrait décrire l’un des traits de caractère de Barbara Cabrita : elle aime observer, décortiquer ses personnages, pour dépeindre à son public un personnage vrai auquel ils peuvent s’identifier au mieux. N’est-ce pas le talent d’une bonne actrice ?