Catherine Marchal : de la paresse au travail acharné

Portrait de la comédienne Catherine Marchal
Photo : DR

De cheffe étoilée dans la série « Ici tout commence », diffusée sur TF1, à flic infiltrée dans « Bronx » sur Netflix, Catherine Marchal incarne l’autorité et la puissance féminine ! Pour PressEyes, l’actrice se confie sur son parcours. 

Aujourd’hui, je rejoins la comédienne Catherine Marchal au théâtre du Palais des Glaces à Paris, pour assister à la fin des répétions de la pièce qu’elle met en scène : « De quoi je me mêle ». Lorsque j’arrive dans la salle, je suis accueillie chaleureusement par les acteurs présents ainsi que Catherine Marchal qui m’invite à m’installer pour observer. Les comédiens répètent, la metteuse en scène supervise, donne des conseils. 

17h30, fin des répétitions. Elle me propose d’aller dans le café d’en face : « J’ai envie d’un bon thé bien chaud. » Un café plein de vie où la musique bat son plein. Le thé à la menthe servi, je démarre avec ma première question habituelle : « À quel âge vous avez su que vous vouliez devenir comédienne ? » Enjouée, la comédienne me répond : « Ah, c’est une super question ! Non mais c’est vrai, j’aime bien en parler parce que je suis assez fière de dire que c’est par flemme et par, comment dire, par ras le bol de l’école que j’ai fait ce métier. » 

Elle avoue qu’elle n’est peut-être pas le meilleur exemple. Alors qu’elle est lycéenne à Janson de Sailly, l’atelier de théâtre est sa seule échappatoire pour être en retard en cours, voire même sécher quelques matières. « Je suis allée dans ce club de théâtre parce qu’à Janson de Sailly à l’époque, et je pense qu’ils l’ont toujours, ils avaient une très belle salle de spectacle. Un vrai théâtre dans le lycée, ce qui est vraiment sympa et du coup on a créé des pièces. Au départ je suis montée sur scène pour rigoler avec mes copains puis assez vite je me suis dit ‘ Ah quand même, il y a un truc fort qui se passe ici et qui me plaît’. »

Le souvenir de ce jour

Sur les planches, la magie opère, les souvenirs ressurgissent… Catherine Marchal se revoit à l’âge de 6-7 ans, accompagnée de sa grand-mère qui l’amène découvrir « Le Bourgeois Gentilhomme » de Molière. Éblouie, la petite fille veut être à la place des acteurs. Une mémoire sensorielle qui fait prendre conscience à l’adolescente que c’est sa destinée, elle veut jouer ! « À ce moment-là, mon but était de passer mon bac à toute vitesse, que l’on ne m’emmerde plus avec les études et ne plus faire que du théâtre. Je ne cherchais pas à faire du cinéma ou de la télévision ni à être connue, je ne voulais rien d’autre qu’être sur scène. C’est ce que j’ai fait pendant des années avant de tourner. Tout ça a commencé sur un malentendu : une grosse paresseuse, une grosse flemmarde qui avait envie de sécher les cours. »

Catherine

Marchal

dans

la quotidienne

” Ici tout commence”

De Molière à Marivaux, en passant par Musset ou encore Claudel, Catherine Marchal s’épanouit de textes en textes, de rôles en rôles. Si elle porte une grande importance aux classiques, la comédienne a envie de relever des défis et de se tester sur un autre genre. Elle est appelée par la troupe du Café-théâtre Le Mélo d’Amélie. « Il y avait une belle équipe de gros rigolos menée par Christian Dob, connu pour ses nombreux succès comiques dans les années 80. J’ai passée l’audition pour leur nouvelle création « Passage à vide » ils m’ont choisie et d’un seul coup je suis passée de Marivaux et Claudel à du théâtre vraiment très comique, un autre monde. » 

C’est grâce à ce style de théâtre, dans lequel les réalisateurs viennent puiser leur future tête d’affiche, que Catherine Marchal fait de nombreuses rencontres et démarre devant la caméra pour la télévision. Mais c’est sa rencontre avec le réalisateur Olivier Marchal qui va faire basculer le cours de sa carrière avec le film « 36 quai des Orfèvres ». « Je pense qu’il y a eu un vrai tournant après ce film-là, j’ai enchainé beaucoup de tournages et de nombreux projets se sont enclenchés »

L’autorité bienveillante 

Un démarrage à la caméra plutôt discret, mais Catherine Marchal prend le temps d’observer et d’être la plus sincère possible dans ses rôles de femmes fortes aux fonctions importantes. « Ce ne sont pas vraiment des choix. Je ne suis pas à un niveau où je choisis mes rôles mais ma chance c’est que l’on me propose des projets que j’aurai choisis. Et ce sont souvent des rôles à fonction, des rôles qui me permettent d’assouvir peut-être des fantasmes d’une fille comme moi qui n’a pas fait d’études suffisantes pour être médecin, avocate ou même professeure. » 

Des femmes aux carrières brillantes, imposantes et autoritaires. Une autorité que Catherine Marchal retrouve en tant que metteuse en scène, mais aussi en tant qu’être humain. « C’est quelque chose que l’on a naturellement qui ne s’apprend pas et surtout qui ne se fabrique pas. Les gens autoritaires qui se forcent à l’être, peuvent devenir des gens désagréables. » Elle considère que ce trait de caractère doit être positif, attentionné et à l’origine de la bienveillance. « Ça peut être même agréable pour les autres de se sentir menés, de se sentir tenus. Je pense que ça doit faire partie d’une relation d’amour avec quelqu’un. D’amour au sens large, c’est-à-dire de faire en sorte que les comédiens en l’occurrence me fassent confiance. Et pour qu’ils me fassent confiance, il faut qu’ils me sentent solide, qu’ils me sentent sûre de moi. C’est ça l’autorité pour moi. Ce n’est pas de décider, d’engueuler, c’est d’amener les gens dans mon univers et qu’ils se servent de moi comme socle. »

Une autorité qu’elle a dans le monde du travail comme à la maison avec ses enfants : « Mes enfants disent souvent ‘quand il y a un problème, maman, elle a toujours la solution’. » Je peux moi-même confirmer de la douceur qu’elle dégage et de sa gentillesse sincère et véritable.

L’exigence d’une performance artistique

Depuis le 2 novembre, Catherine Marchal n’endosse pas un, mais deux rôles à fonction en tant que cheffe étoilée et professeure, dans la nouvelle quotidienne « Ici tout commence » diffusée sur TF1. Un nouveau programme qui nous ouvre les portes de l’Institut Auguste Armand, l’une des plus prestigieuses écoles du cuisine. Un presque huis clos dans lequel différentes histoires s’enchaînent. Un format récent qui a demandé de la réflexion à Catherine Marchal, qui a pris son temps pour évaluer les côtés positifs avant de dire oui.

« C’est un genre très difficile. Le public, à cette heure d’antenne, ne reste pas devant sa télé, sans rien faire d’autre. Je l’assimile un peu comme au théâtre de rue : les gens passent, s’arrêtent ou pas. Ils peuvent faire autre chose, manger une glace, regardent leur téléphone…ils ne sont pas dans un théâtre, obligés d’être assis à nous regarder. C’est un peu ça la quotidienne, c’est comme un théâtre de rue, c’est-à-dire qu’il faut choper les gens avec des codes différents. C’est un genre qu’il faut prendre en compte dans l’évolution de la télévision, parce que c’est réellement un bel outil de travail ».

Pour l’actrice, ce n’était pas l’histoire qui primait, qu’elle considère être toujours les mêmes : l’amour, les trahisons, les mensonges, les enfants cachés, les divorces… Catherine Marchal porte sur ce projet un regard au niveau de l’investissement artistique de chacun, des scénaristes, en passant par les réalisateurs, jusqu’aux acteurs. « Le casting pour moi était important, il fallait que les partenaires en face est le même niveau d’exigence que moi. » Une série qu’elle partage aux côtés de son ami Francis Huster, qui joue son mentor et fait d’elle l’une des cheffes les plus reconnues. Une complicité dans la vie qui se voit à l’écran et donne à ce duo une belle sincérité. 

Dans la peau de Claire Guinot, Catherine Marchal s’est donc invitée dans les cuisines pour s’imprégner de l’atmosphère et apprendre les bons gestes pour être au plus proche de la réalité. « Sur le tournage, on a eu le chef Jean-Pierre Cazals, qui est venu nous coacher trois jours. Je lui ai posé 10.000 questions sur la gestuelle. Pas forcément comment on fait cuire un poulet, je m’en fous. Je ne vais pas faire cuire un poulet, je ne vais pas faire une sauce, je vais faire semblant de la faire, donc ça ne m’intéresse pas de savoir cuisiner. Ce qui m’intéresse, ce sont les gestes : comment on tient un couteau ? Comment on regarde un plat, comment on le sent, comment on le goûte ? Quel temps on a avant d’avoir toutes les saveurs en bouche ? Tous ces petits détails que l’on n’imagine pas. Qu’est-ce que l’on fait avec son torchon ? On essuie tout le temps, il faut toujours que ce soit nickel. »

Une cuisine masculine

Une immersion au cœur des cuisines où elle a pu observer un univers très macho qui laisse peu de terrain à la femme. « J’ai été subjuguée par le combat qu’elles doivent parfois mener pour se faire une place. Je pense que le milieu de la cuisine est plus macho que celui des flics ou d’autres milieux dits masculins comme la politique ou le foot ». Les cheffes qu’elle a pu observer pour préparer son personnage se donnaient corps et âme pour être plus inventives, plus diplômées.

Certaines en deviennent parfois même très dures. « D’ailleurs, tu remarqueras, les chefs cuisiniers maintenant, ce sont des stars. On les voit à la télé, ils font les émissions…. ». Une profession qu’elle juge bien plus inégalitaire que chez les « flics ». Un milieu que la comédienne connaît très bien par ses nombreux rôles au sein de cette profession. Elle les décrit comme très solidaires envers les femmes. « Elles sont souvent très utiles pour plein de choses que les hommes ne peuvent pas faire. Il y a une vraie complémentarité et il y aussi de la part des collègues masculins un vrai soutien par rapport à la femme. Je ne dis pas qu’il n’y a pas des gros cons comme partout, mais en général ce que je vois dans les équipes que je connais, c’est qu’ils respectent énormément les femmes. Ils respectent beaucoup leurs patronnes. Il y a des grands commissaires de police comme Martine Monteil qui sont respectées encore aujourd’hui par les hommes qu’elles ont eus sous leurs ordres. »

« Je suis une très bonne élève studieuse »

Un corps professionnel dans lequel on la retrouve dès le 30 octobre sur Netflix avec le film « Bronx » d’Olivier Marchal. Une histoire qui nous plonge en plein cœur des quartiers Nord de Marseille. Après une fusillade orchestrée par l’un des gangs les plus dangereux, deux flics rivaux, Vronski de la BRI et Costa de le BRP, vont être réquisitionnés pour mener à bien l’enquête. Mais la mort douteuse de l’un des témoins clés va enclencher la guerre. Ce n’est plus désormais gang contre gang, mais flics contre gangs. Catherine Marchal, dans la peau de Katia de Vrindt, va de son côté surveiller chacune des brigades pour mette le doigt sur une éventuelle taupe.

Catherine Marchal dans le film "Bronx"
Catherine Marchal dans le film “Bronx” réalisé par Olivier Marchal.
Disponible sur Netflix.

« Bronx » est rythmé par un enchaînement d’actions et de cascades qui ont demandé aux acteurs une grande préparation physique et un coaching avec une équipe spécialisée (Figlarz action). « Je m’étais beaucoup entrainée depuis « 36 quai des orfèvres » et notamment pour la série sur Canal+ « Section Zéro ». Dans Bronx ,j’avais une seule scène d’action et c’est vrai que ça revient assez vite, même si quand j’arrive dans un film, je fais comme si je ne savais rien et je repars à zéro pour bien écouter les coachs, bien écouter les conseils. Je suis une très bonne élève studieuse, parce que déjà c’est dangereux, il ne faut pas se blesser et être crédible dans les scènes d’actions. Quand on n’est pas cascadeur, il faut écouter. »

Un genre cinématographique qui demande de nombreux challenges physiques. Pourtant, pour la comédienne, ce n’est qu’une question d’entraînement. Catherine Marchal me révèle que son plus gros challenge pour ce film est une scène presque intime avec le comédien Lannick Gautry. « Je ne connaissais pas du tout ce comédien. Il faut tout de suite une complicité amoureuse, que l’on donne l’impression que ça dure depuis des années, avec quelqu’un que l’on ne connaît pas. Et ça, je dirais que c’est une sorte de challenge un peu invisible, mais qui n’est pas si évident. »

Si jouer était au départ une histoire de flemmardise, on peut dire qu’aujourd’hui c’est sa soif de vivre et que l’on ne l’arrête plus ! Catherine Marchal a prévu de retourner sur les planches en tant que comédienne, mais aussi en tant que metteuse en scène : « J’ai deux mises en scènes que je voudrais faire, parce que je voudrais continuer à mixer actrice et metteuse en scène. Pour moi, c’est essentiel. J’ai besoin de me reposer l’ego, j’ai besoin de ne pas penser à moi tout le temps, j’ai besoin de m’occuper d’autre chose et je pense que les acteurs aiment bien ça aussi. Ça me manquerait trop d’arrêter. »

Une discussion passionnante et de partage, accompagnée de points de vue et de ressentiments, avec une actrice à l’énergie débordante et un sourire qui ne l’a pas quitté du début à la fin !