Guy Lagache, le journaliste au service de l’Humain

Guy Lagache, Journaliste, M6, Mathilde Dandeu, PressEyes

Guy Lagache, lors des Journées nationales du livre et du vin à Saumur, en octobre 2021.

Enfant, il y a toujours ces personnes qui vous inspirent, à un tel point qu’elles vous transmettent leur propre passion. Guy Lagache, fait partie des journalistes de sa génération qui m’ont donné le goût de ce métier. Je me souviens regarder Capital et vouloir mener mes propres enquêtes, aller à la rencontre des gens, poser des questions… Et c’est seize ans plus tard ( ça ne me rajeunit pas), que je me retrouve face à ce maître de la télévision, lors des journées Nationales du livre et du vin à Saumur. Pour PressEyes, il s’est prêté au jeu du portrait. 

Samedi 9 octobre 2021, il est aux alentours des 20h30, quand nous nous installons dans la salle de réception du château de Saumur. Pas de place à titrer, les journalistes, les écrivains, s’installent là où bon leur semble. C’est ainsi que je me retrouve assise à côté de Guy Lagache, qui nous demande s’il est possible qu’il se joigne à notre table. C’est avec beaucoup d’aisance que tout le monde échange, peut-être que le vin servi tout au long de la journée nous aide aussi un peu. La fin de la soirée arrive, mais avant de partir, je demande à Guy Lagache s’il est possible de venir le voir le lendemain pour réaliser son portrait. Et si j’écris ces mots, vous vous doutez bien que sa réponse fut positive. 

Apprendre grâce aux autres 

Dimanche 10 octobre, il est 16h45, quand je me rends au stand de Guy Lagache qui me demande si je peux repasser dans dix petites minutes. Je trépigne d’impatience d’en connaître un peu plus sur ce meneur d’enquêtes. Dix minutes plus tard, me revoilà. Je lance mon micro et lui pose ma première question : “À quel moment a t-il su qu’il voulait devenir journaliste ?“  “J’avais entre 15 et 17 ans, je sortais de l’adolescence. C’est à la fois en écoutant des amis de mes parents qui étaient journalistes, leurs histoires me faisaient rêver et à la fois, j’ai toujours été curieux des gens et j’adore poser des questions.“  Et c’est avec surprise, qu’il me révèle qu’il n’était pas très bon à l’école. Ce qui faisait et fait toujours vibrer Guy Lagache, c’est l’autodidacte. Il aime apprendre sur le monde qu’il l’entoure en allant à la rencontre des autres, c’est pour lui sa “façon de (s)’éduquer “.  Le journalisme est donc une voie toute tracée pour le jeune homme qu’il était et l’homme qu’il est devenu, puisque c’est un métier qui demande à comprendre les faits grâce à l’autre. 

 

 
 
 
 
 
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L’apprentissage du métier 

Si Guy Lagache est connu pour ses nombreux programmes télévisés, il a débuté dans la presse écrite aux États-Unis. “Quand je suis sorti de Colombia, l’université dans laquelle j’étais aux États-Unis, j’ai commencé à écrire en anglais pour des journaux de presse écrite. J’adorais vraiment manier la langue anglaise.“  De retour à Paris, avec son statut officiel de journaliste, Guy Lagache fait des rencontres qui le mènent naturellement vers la télévision et démarre en tant que reporter pour le journal télévisé. Il voyage beaucoup et couvre globalement l’international. Des premiers pas à la télévision, qu’il qualifie de très formateurs : “Cette expérience de reporter a été très bénéfique. J’ai appris à développer le sens de l’information, l’art de la synthèse, identifier une histoire, la raconter et la traiter rapidement.“ 

Mais Guy Lagache veut aller plus loin. Ce qu’il l’intéresse c’est de creuser des sujets, de faire de l’enquête avec de longs formats.

La confiance du groupe M6 

Par chance, ou tout simplement pour son professionnalisme, on lui propose d’intégrer l’équipe d’une toute nouvelle émission sur M6 : Capital diffusée le dimanche soir. “De journaliste faisant de l’actualité, je suis passé à journaliste faisant de l’enquête, sur des formats qui dans notre jargon on appelle des formats de 26 minutes, de 52 minutes voire de 90 minutes. Il faut donc creuser un seul sujet et aller au fond des choses et c’est ça que j’ai bien aimé avec la télévision : de pouvoir faire ça, sur un médium populaire, où l’on pouvait à la fois jouer sur le texte et l’image. C’était très épanouissant.“ Une émission dont il prendra la direction et qu’il incarnera pendant près de 8 ans. Capital fera de lui l’un des journalistes les plus importants du PAF. 

Mais avant d’être à la tête du groupe M6, la chaîne offre à ce génie de l’information de moins de 35 ans à l’époque, l’opportunité de créer sa propre émission. Baptisée Secret d’actualité,  elle est la première émission d’investigation de la chaîne : “Capital étant accès sur l’économie, là c’était sur l’information générale. Comme son nom l’indique, on revisitait des grands évènements de l’actualité, pour comprendre comment en coulisse ces évènements se déroulaient. On sortait même des informations qui étaient totalement inédites.“ Un challenge de taille pour Guy Lagache, qui se retrouve avec une responsabilité vis-à-vis du public :  il doit lui livrer des messages qu’il attend. Mais c’est aussi une responsabilité vis-à-vis de la chaîne qui lui fait confiance : “C’est un challenge dès lors que vous concevez un programme. Ensuite, votre vision doit aller à l’antenne, donc il faut aller au bout des choses.“

Aujourd’hui, les programmes ne cessent de se développer avec des nouveaux formats et l’apparition accrue des chaînes d’information. Une évolution de la télévision, mais aussi de la transmission de l’information, que je trouvais intéressante d’évoquer avec cet amoureux de l’actualité. 

La liberté d’informer 

Sur le fond, je pense que plus il y a de chaînes, plus il y a d’informations et mieux c’est“, m’avoue-t-il. Toutefois, il met en garde les lecteurs ou encore les téléspectateurs : “La question qui est importante, c’est celle du sérieux de l’information, de sa véracité. J’ai envie de dire que d’un côté c’est le digital qui permet une démocratisation des contenus et à l’inverse, il pose des questions sur comment s’assurer de ne pas être instrumentalisé. Il est essentiel de faire attention à ce qui relève de l’information et ce qui relève de la manipulation.“ Un vrai sujet qui se pose aujourd’hui, mais que le journaliste ne voit pas comme un problème, mais comme une chance d’être dans un pays où l’information est libre de circuler qui est pour le présentateur “un indicateur de la démocratie dans laquelle nous vivons.

Une liberté qui lui offre la possibilité de s’épanouir à travers plusieurs facettes qu’est l’information, l’écriture et l’image. 

Guy Lagache : le romancier 

Journaliste, présentateur, créateur, producteur… On pourrait penser que toutes ces casquettes auraient pu suffire à Guy Lagache. En plus de sa grande curiosité sur le monde, il semble que l’homme aime se challenger, s’ouvrir de nouvelles portes et continuer sa quête d’apprentissage. 

Depuis peu, il est désormais auteur. En 2019, il sort son premier ouvrage  : “Un amour Impossible“. L’histoire se déroule lors de la Seconde Guerre mondiale et suit les pas d’un homme déjà marié avec des enfants. Son destin bascule, lorsqu’il rencontre une Britannique dont il tombe éperdument amoureux. Son amour est si fort, qu’il s’en laisse influencer sur ses propres choix à savoir : s’il doit rejoindre ou non la résistance ? 

L’idée de ce roman lui vient en 2015, lors d’une enquête. Étrangement (et presque sans surprise) son métier le suit de près même dans cette facette plus artistique. Il m’explique qu’il est la combinaison de plusieurs facteurs : “Je faisais des programmes sur l’histoire qui s’appelait Histoire interdite. Il s’agissait de faire de l’investigation sur l’histoire.“ Directeur de l’information, des magazines et des documentaires de la chaîne D8 devenue C8, sur le groupe Canal+, il a eu l’idée avec ses équipes de développer une série d’émissions historiques, mais en s’intéressant seulement aux grands évènements tout en se questionnant comme une enquête : “À l’époque, on avait fait la face cachée du débarquement à l’occasion de son 70e anniversaire. Dans l’enquête qui avait été faite avec le producteur et les équipes, on avait retrouvé une photo de mon grand-père qui débarquait.“ Un grand-père qu’il n’a pas connu, disparu des années plus tôt, mais qui sera finalement sa source d’inspiration pour romancer cette période de l’histoire. 

Avec l’aide de l’une de ses tantes, Guy Lagache se renseigne sur son grand-père : “J’ai décidé d’en faire un roman, par pudeur à l’égard de ma propre famille et puis parce que ça me permettait en même temps de faire un travail sur des questions qui me semblaient fondamentales : qu’est-ce que j’aurais fait à cette époque si j’avais vécu en 1940, face à mon pays qui basculait ? “ 

Fasciné par ses découvertes, les mots ne cessent d’en découler de sa plume pour en devenir un beau manuscrit. 

Une histoire de guerre et d’amour 

Une oeuvre certes aux faits historiques, mais qui souligne la complexité de l’amour et des choix auxquels les humains sont confrontés. Un point essentiel, que Guy Lagache a voulu retranscrire avec ses personnages qui se retrouvent face à des dilemmes cruciaux : s’en tenir à la politique ou écouter leur coeur. “Quand on regarde ce qui a conduit les gens à prendre part pour la résistance en tout cas au refus de se soumettre à la France de Pétain, d’abord c’était une petite minorité de gens et ensuite, le premier mois qui a suivi le 17 juin 1940, quand Pétain décide d’arrêter les combats, c’est souvent des gens qui font des choix presque spontanés. Ils ne sont plus dans une analyse politique, plus rien n’est calculé et c’est ça que je trouve intéressant : c’est ce choix humain impulsif qui conduit, non pas à des raisons politiques, mais à des raisons humaines, sur des valeurs, des convictions intimes.“ 

 

 
 
 
 
 
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Un portrait qui se termine sur cette notion presque philosophique de l’humain et de ses propres choix. “Un amour impossible“ réunit tout ce qui anime Guy Lagache depuis sa jeunesse : la politique, l’histoire, mais aussi l’humain. D’ailleurs, l’humain est une valeur essentielle au journaliste toujours mené à aller à la rencontre de l’Homme.  

Guy Lagache bien que fascinant, doté d’un grand savoir sur de nombreux sujets, se révèle d’une grande simplicité et discrétion. Fier de son parcours, il ne s’en vante pas et c’est avec beaucoup d’humilité qu’il confie qu’il a encore du “chemin à faire“, mais qu’il faut “s’accrocher pour atteindre ses objectifs“