L’acteur Sami Outalbali et la poésie du mouvement

L'acteur Sami Outalbali

On n’a pas terminé d’entendre parler de l’acteur Sami Outalbali ! De « Fiertés » à la série « Les Grands », en passant par « Mortel » et prochainement « Sex Education », le comédien ne s’arrête plus. Il se livre sur son beau parcours pour PressEyes.

Direction le café Loui’s Corner dans le 10e arrondissement de Paris pour rencontrer l’étoile montante de l’écran français : le comédien Sami Outalbali. Sur place, je le retrouve en terrasse, emmitouflé dans son sweat gris à capuche et son bomber noir. Il m’attend avec un thé et son cousin, qui l’a accompagné. Je sens que je n’ai pas le droit au moindre faux pas avec mes questions…

Sami Outalbali prend le temps d’allumer une cigarette, avec ses mains ornées de bagues en argent, avant de se plonger dans ses souvenirs. « J’ai commencé petit, j’avais six ans. J’ai de suite adoré, mais je ne sais pas pourquoi, jusqu’à mes 17 ans, je me persuadais que je voulais faire d’autres trucs, car je m’intéressais à beaucoup de choses. » Mais l’amour pour la scène est bien trop fort. Son baccalauréat en poche, le jeune homme part en école de théâtre, où il poursuivra une formation de deux ans.

 

 

 
 
 
 
 
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Entre temps, nous avons pu voir l’acteur dans « Les Tuche » en 2010, dans «Vive la colo !» en 2012 ou encore dans «Sam», sur TF1 en 2016. Mais en grandissant, le comédien ne veut plus seulement jouer ce qu’on lui propose, mais faire ses propres choix et s’imposer. « Je suis sélectif que depuis peu de temps. Quand j’étais petit, je prenais ce que l’on me proposait . Mais en grandissant, je me suis dit que je voulais faire des choses qui me plaisaient vraiment et dont je pourrais être fier même dans 20 ans. » Tout bascule pour lui lorsqu’il réussit le casting pour la série « Les Grands » en 2015, dans laquelle il interprète Ilyes.

Des projets de qualité sinon rien !

Un projet risqué qui lui fait prendre conscience que c’est ce qu’il aime, ce à quoi il aspire en tant que comédien. « Après j’ai eu ‘Fiertés’ qui m’a conforté dans cette voie-là. ‘Sex Education’ et ‘Mortel’, c’est plus mainstream, mais c’est de qualité. ‘Mortel’, c’était un pari très risqué, c’est ça qui m’a plu. C’est une création originale Netflix, il n’y a pas d’antécédents. Il n’y avait pas de saison 1 pour dire si ça avait marché ou pas. On avait pas de repères dans ce genre en France. On ne savait pas du tout si ça prendrait. Je me suis dit : ‘Si je suis pris, je sais que je vais kiffer de le faire’. Pour ‘Sex Education’, j’étais fan de la série, c’est quelque chose de très mainstream mais c’est extrêmement qualitatif. Sincèrement, je trouve que c’est l’une des meilleures séries produites par Netflix, voire l’une des meilleures séries depuis ces dix dernières années dans ce genre, dans l’ouverture du dialogue et dans l’honnêteté. »

 

 
 
 
 
 
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Aujourd’hui, du haut de ses 20 ans, ce qui lui importe, c’est d’être épanoui devant la caméra et d’incarner des personnages qui le transportent. Une magie du métier qu’il apprécie. «Quand ça rentre dans ton corps, c’est assez inexplicable comme sensation. Tu pars… Il y a une liberté… Tu t’en vas avec ce que tu joues et ça te transporte. »

Face à moi, Sami Outalbali ne répond pas seulement à mes questions par la parole. Il s’exprime en émettant une belle gestuelle. Aucun mouvement brusque, tout n’est que fluidité avec ses mains qui balayent de droite à gauche. Son regard divague quand il cherche à répondre avec profondeur et sincérité, puis il revient d’un regard franc et perçant. Observer Sami Outalbali, c’est tout un art.

L’expression du corps dans le jeu

Ce qui m’amène à aborder cette importance du corps qu’il a dans le jeu. « C’est un truc que j’ai mis beaucoup de temps à adopter. C’est l’école de théâtre qui m’a fait beaucoup bosser là-dessus. J’avais tendance à être très figé, à retenir des impulsions.» Le comédien confie que le corps en lui-même pourrait suffire, sans que l’on ait besoin de filmer le visage. Il prend l’exemple des acteurs qui jouent de dos ou encore Alex Lutz, qu’il admire dans le film « Guy » : « Dans lequel il a eu le César du meilleur acteur. Il a réussi, je trouve, un travail sur le corps qui est assez extraordinaire. Quand il est « Guy », il a une manière de jouer. Même en fumant, dans la façon de tenir sa cigarette, il joue et ça c’est incroyable ».

Sami Outalbali transpose cet art dans la série « Les Grands ». Si dans la première saison son personnage Ilyes est assez réservé, il déploie peu à peu ses ailes en dévoilant qui il est, tout en assumant son homosexualité auprès de ses camarades. L’adolescent fait de sa vie une véritable danse. Même dans sa démarche, rares sont ses pas qui ne sont pas rythmés. Il plonge le public dans un véritable spectacle visuel. Sami Outalbali a vu grandir son personnage au fil de ces trois saisons. « La saison 3 des ‘Grands’ est arrivée après quatre ans. Le personnage a eu le temps de mûrir, donc c’était moi, avec des modifications et des particularités, mais c’était moi. Je n’ai pas eu le sentiment de vraiment jouer Ilyes dans la saison 3. Je suis arrivé sur le tournage et j’ai juste kiffé en sachant que c’était la dernière saison. Je me suis vraiment fait plaisir et je crois que ça s’est senti, j’espère ».

À travers cet adolescent, Sami Outalbali a mis en avant des moments de perdition que l’on peut expérimenter quand on découvre la joie des fêtes, l’alcool et tout ce qui s’ensuit. Mais aussi les premiers chagrins d’amour qui ne sont pas toujours faciles à surmonter, avant de retomber dans les bras d’une nouvelle personne que l’on aime un peu plus fort. « C’est ce que l’on apprend quand on est petit, quand on a notre premier chagrin d’amour. Nos parents nous disent ‘Tu en trouveras un autre’. On ne veut pas les écouter, mais c’est très vrai. Ilyes, c’est ce qu’il raconte et c’est ça qui était fort à jouer ».

« Le sexe de la personne en face on s’en fou »

Si Sami Outalbali joue des personnages forts, il joue surtout des histoires fortes, notamment en interprétant des jeunes hommes gays. « Dans ‘Fiertés’, le rôle que j’ai interprété vivait dans les années 80. C’était un rôle qui me tenait vraiment à cœur, car c’est une histoire que je trouve tragique qui n’est pas encore assez montrée. Ces jeunes d’origine maghrébine qui ont subi des violences et qui ont dû cacher leur homosexualité ».

Pour Ilyes, l’acteur m’explique qu’il n’avait pas l’impression de jouer une personne homosexuelle. Pour lui, ce n’était qu’un détail. « Il aurait pu être hétérosexuel, ses histoires d’amour auraient été les mêmes. Le seul truc qui change, c’est le sexe de la personne en face. Ce qu’il faut montrer, c’est que rien ne change. Le sexe de la personne en face, on s’en fout. Si on est très honnête dans son jeu, peu importe ce que l’on a dans la tête, ce que l’on veut mettre en avant au cinéma, c’est l’histoire d’amour. Ce n’est pas la personne que l’on aime, mais c’est l’histoire en elle même qui est l’amour. Pour moi, l’histoire d’amour n’est pas plus ou moins puissante parce qu’elle est homosexuelle ou non. Elle a plus ou moins d’obstacles malheureusement quand elle l’est, mais évidement que l’on peut être acteur et jouer ce que l’on veut ».

 

 
 
 
 
 
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Sami Outalbali le définit comme « la beauté de ce métier » : « Pour moi, si on veut vraiment le faire à fond, il faut pouvoir accepter de tout jouer ». Selon le comédien, il serait dommage de se fermer des portes parce que l’on ne veut pas interpréter un gay, par peur d’être mis dans des cases. « Jouez-le et vivez-le, ça apportera et ça peut rendre service à tellement de gens ». Être acteur ce n’est pas seulement endosser des rôles, c’est également porter des messages tout comme Sami Outalbali en incarnant Ilyes. Le comédien a été un exemple pour de nombreux adolescents : « Des jeunes m’ont dit que c’était leur histoire que j’avais montrée, qu’ils s’étaient reconnus là-dedans et que ça leur avait fait du bien de voir qu’ils n’étaient pas les seuls. Souvent, quand on est adolescent, il nous arrive des choses dans notre tête, dans notre cœur et on pense être seul à les ressentir, alors que non. Ça arrive à d’autres gens. Le réalisateur des ‘Grands’ m’avait dit une phrase pendant le tournage: ‘Il y a autant de sexualités que d’êtres humains’. Quand on se dit ça, c’est que l’on a tout compris ».

L’acteur donne une belle image à tous ces jeunes comédiens, sur leur « devoir » à pousser la voix pour faire évoluer les mentalités sur la communauté gay. Une communauté pleine d’amour, dont il ne faut pas avoir honte de représenter à l’écran !

La nuit tombe sur Paris, la discussion tend malheureusement vers la fin. Sami Outalbali me fait part de ses futurs projets, dont « Un vrai bonhomme », en salle depuis le 8 janvier, qu’il faut absolument aller voir car, selon les dires du comédien, il est « ouf ». Avant de partir, je tente d’en connaître un peu plus sur son personnage dans « Sex Education ». La réponse est catégorique. « Non ! », lance-t-il tout en rallumant sa troisième ou sa quatrième cigarette.

Sami Outalbali a un fort tempérament entremêlé de douceur. Il reflète ainsi, pour la nouvelle génération, l’image des plus grands d’un autre temps, comme notre éternel Serge Gainsbourg.