Marc Ruchmann : “Depuis quelques années j’essaie de réunir acteur et musicien“

Marc Ruchmann à Canneseries (Crédit photo : Olivier Vigerie)
Du cinéma, en passant par le petit écran, Marc Ruchmann est un comédien accompli. Connu pour ses personnages romantiques et solaires, notamment dans “Plan Coeur“, disponible sur Netflix, l’acteur tend à dévoiler d’autres facettes avec des rôles plus sombres et mystérieux. Jury des séries courtes pour la cinquième saison de Canneseries, nous l’avons rencontré.
De “Plan Coeur“ à “Loue-moi“ ou encore dans “Big Five“, Marc Ruchmann incarne l’homme idéal : doux et gentil. Pourtant, il y a quelques mois, il a pu surprendre son public en s’illustrant dans un tout autre personnage. “Là aussi j’étais doux et gentil. Il y a juste des moments où je vrille un peu…“, plaisante l’acteur. Dans la peau de Mathias Maubert pour “Manipulations“ sur France 2, Marc Ruchmann incarne un pervers narcissique. Une mise en lumière importante, pour une prise de conscience sur ces personnes qui ont un fort pouvoir de manipulations. “On ne décide jamais des personnages qui vous parviennent. Je pense qu’ils ont pensé à moi parce qu’il fallait que l’on comprenne que dans certains cas, c’est très difficile pour l’autre de se détacher d’un mec comme ça. Difficile parce qu’il cache bien son jeu, il semble ultra sincère. C’est vraiment de la belle poudre aux yeux.“
“C’était un véritable challenge d’être crédible“
Un individu au double visage, aimant et chaleureux quand il l’a décidé et violent psychologiquement quand sa compagne qu’il dit “aimer“ n’agit pas dans son sens. Et si l’on ne connaissait pour le moment que la part sensible du comédien, c’est ce qui a rendu le personnage plus fort et authentique : “Ils se sont servis de mes autres personnages un peu romantiques, qui sont sympas, souriants pour mieux basculer derrière. C’était un véritable challenge d’être crédible quand ça devait basculer.“ Un pari réussi, puisque Mathias Maubert n’est que détestable.
Un personnage que Marc Ruchmann voit comme un acteur, comme il l’a expliqué : “Il se créait un personnage, il se créait des souvenirs, pour qu’elle y croie et qu’il soit lui-même ému en le racontant…c’est terrifiant.“
Pour être le plus juste, il a donc fait de ce personnage une mise en abyme, en le jouant au premier degré, comme s’il était un comédien : “Il le joue tellement qu’il est à fond, c’est-à-dire qu’il est vraiment amoureux d’elle, il lui fait vraiment à manger, il est vraiment bien avec elle… Il fallait que ce soit important. Par contre, il doit vraiment exploser dès qu’elle dit quelque chose qui lui déplaît, il faut vraiment que ça l’atteigne. Finalement, c’est très basique, c’est le chaud et le froid.“
Marc Ruchmann n’en a pas terminé avec les personnages mystérieux. Prochainement, on le retrouvera sur M6 aux côtés de Julie de Bona dans “La maison d’en face“.
Suspense et complexité
Un thriller sur une note dramatique, qui met en scène Eva (Julie de Bona) et Yanis (Marc Ruchmann). Le couple décide de prendre un nouveau départ et s’installe dans un pavillon de banlieue. Tout ne se passe pas comme prévu et leur bonheur se transforme en cauchemar, quand leur petite fille d’un mois décède dans un tragique accident. Heureusement, ils peuvent compter sur le soutien de leurs voisins d’en face : Lucie, infirmière et Stéphane, flic. Mais cette amitié sera-t-elle vraiment saine et sincère ? “ C’est un peu un quatuor. Il y a quatre personnages avec des histoires dans chaque couple, des histoires entre les deux femmes, entre les deux hommes… Entre les hommes et les femmes, avec les autres voisins aussi, car on est dans une résidence… Il y a une enquête par-dessus ça et beaucoup de sujets qui sont développés“, a souligné Marc Ruchmann. Des destins qui vont s’entremêler et parfois même au-delà du raisonnable … “C’est très complexe, il y a des noeuds dans tous les sens“, a précisé le comédien, qui donne déjà l’envie de résoudre l’énigme.
Mais entre personnages obscurs et l’enchaînement des tournages, Marc Ruchmann ne dit pas non à quelques semaines de vacances, “le temps de souffler“.
Marc Ruchmann aime “laisser son imaginaire planer“
Il prend exemple avec “Manipulations“, dont le tournage a duré trois mois : “C’était intense, j’étais content qu’il y ait eu deux mois de vacances. Non pas que je n’arrivais pas à quitter le personnage, mais c’était chargé et j’étais un peu épuisé.“ Une pause essentielle pour le comédien, qui a ce besoin de se nourrir d’art.“J’aime prendre du temps pour bouquiner, voir des films, laisser mon imaginaire planer un peu, faire de la musique… Ces moments sont importants pour embrayer sur un nouveau personnage“, ou sur d’autres projets.
Marc Ruchmann n’a pas comme seul talent celui de comédien, il est aussi un grand musicien. Deux arts qui sont venus à lui naturellement, bien que plus jeune, il ne pensait pas un jour les synthétiser: “C’est vrai que j’ai un peu compartimenté tout ça à une époque. Avant, ça ne se faisait pas beaucoup de tout mélanger. Les gens du métier n’aimaient pas trop que l’on fasse plusieurs choses différentes, parce qu’ils ne savaient plus si l’on voulait être acteur, musicien…“
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Pour l’artiste, il n’était pas vraiment question de faire un choix. La seule solution était d’en faire deux choses bien distinctes. Finalement, le destin le rattrapera et il sera amené à porter sa musique pour des films. “Depuis quelques années, j’essaie de réunir acteur et musicien, notamment par la création de musique de films, mais aussi parce que j’en parle plus facilement et que je co-réalise mes clips. C’est très rattaché, puis ça fait partie de ma vie. Il y a une facette dans la musique que l’on ne connaît pas en tant qu’acteur et qui pourtant nourrit cette facette-là et inversement.“
C’est ainsi qu’il a composé la musique du dernier film de Jonathan Safir : “Des hommes de paille“. Un travail parti du réalisateur, tombé sous le charme des notes de Marc Ruchmann. Ensemble, ils discutent, réécoutent les morceaux qui ont marqué l’esprit du cinéaste pour son long-métrage. Des morceaux qui selon le comédien n’étaient pas bien enregistrés. Il propose alors à Jonathan Safir d’en refaire un enregistrement : “Ensuite, j’ai vu des montages, j’ai vu des images et c’est à ce moment-là que je suis entré en studio pour faire des sessions avec les musiciens. Le travail final était de savoir comment et où on allait répartir la musique et définir le thème principal pour le décliner.“
De multiples projets pour Marc Ruchmann qui a cette soif artistique pour le plaisir de son public. Dernièrement, pour le festival Canneseries, il s’est adonné à la fonction de jury pour la section séries courtes.
“Une oeuvre n’a pas à être jugée“
L’artiste qui semble de nature gentil et humble est quelque peu gêné à l’idée de “juger“ et considère ce mot un peu fort : “Une oeuvre n’a pas à être jugée. On est dans une compétition, mais je suis plus dans le ressenti de ce qui m’a touché, je cherche à être bousculé, ému, embarqué.“ Un exercice difficile pour le jury qui comme le public, n’a le droit qu’à un ou deux épisodes : “ Se faire un avis sur l’ensemble d’une série avec un seul épisode c’est chaud.“ Une tâche compliquée pour les réalisateurs et les acteurs, qui doivent réussir à capter le jury en un clin d’oeil : “Mais il y en a qui arrive bien“, conclut Marc Ruchmann, marqué d’un grand sourire.