Sonia Rolland et Béatrice de La Boulaye : deux actrices libres dans leur tête

Béatrice de la Boulaye et Sonia Rolland dans "Tropiques Criminels"
Depuis le 30 septembre dernier, elles sont de retour pour une saison 3 dans “Tropiques Criminels”. Mélissa Sainte Rose et Gaëlle Crivelli reviennent dans leur uniforme, toujours aussi sérieuses à leur manière, toujours aussi glamour à leur propre façon, toujours aussi drôles avec leur propre humour et toujours avec des histoires de cœur compliquées… Vous l’aurez compris, cette saison ne sera pas de tout repos pour nos deux flics préférées de France Télévisions. Pour PressEyes, Sonia Roland et Béatrice de La Boulaye se sont prêtées au jeu du portrait, et il faut dire que l’on a beaucoup ri.
Il est 12h quand j’arrive chez Fédération Entertainment dans le 8e arrondissement de Paris. Sonia Rolland et Béatrice de La Boulaye sont toujours en interview. Je patiente un peu et prends le temps de les observer. Les comédiennes m’ont l’air drôle et je suis loin de me tromper… C’est à mon tour, et oui lors des journées promos comme on dit, les journalistes, nous passons un peu à la chaîne, avec parfois les mêmes questions auxquelles les deux comédiennes doivent répondre comme si c’était la première fois. C’est aussi tout un travail… d’actrice ! Quand elles me voient arriver, j’ai le droit à de belles éloges sur ma tenue, des compliments que je leur retourne car les deux acolytes ont aussi un style vestimentaire que Cristina Cordula aurait sans aucun doute validé. Mention spéciale pour les beaux colliers superposés de Béatrice de La Boulaye et de la casquette Cravache de Sonia Rolland. Mais nous ne sommes pas ici pour parler mode, mais de la sortie de la saison 3 de “Tropiques Criminels”.
La fluidité du jeu
Les deux premiers épisodes, diffusés le 30 septembre dernier, ont déjà posé le ton : cette saison va être badass : Gaëlle Crivelli trouve l’excuse de ne pas se marier et de débuter une enquête en robe blanche, quand Mélissa Sainte Rose fait chavirer le cœur d’un séduisant jeune homme d’une vingtaine d’années. Et après deux premières saisons plébiscitées par le public et la critique, les comédiennes étaient heureuses de se retrouver en Martinique.
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Bien que les tournages ne durent que quelques mois, les actrices ont depuis appris à mieux se connaître, notamment au “niveau des humeurs“, comme l’a souligné Sonia Rolland. Un apprentissage qui s’est fait par le biais de leurs personnages, qui leur ont permis de comprendre comment elles fonctionnaient en tant que comédienne. “Son personnage, Gaëlle Crivelli, demande à Mélissa d’être canalisée constamment. Je ne dirais pas que j’ai besoin de canaliser Béa, mais elle sait quand je suis fatiguée. Elle comprend vite quand je vais bien ou quand je ne vais pas bien.” Une compréhension primordiale pour se donner de l’espace entre partenaire de jeu.
Les actrices aiment jouer ensemble, c’est une certitude. Mais comme dans un couple où s’aimer n’est pas toujours suffisant, se donner seulement la réplique ne l’est pas non plus. Il faut aussi que les acteurs, d’autant plus de séries, aient envie des mêmes choses, mais aussi avec l’ensemble de l’équipe. “Cette saison 3, elle nous ressemble. Et plus ça va, plus l’équipe est solaire, bienveillante, généreuse et enthousiaste. Ça nous porte et c’est vraiment chouette d’avoir une production à l’écoute de nos souhaits qui sont les mêmes : un mélange d’exigence et de kiffe“, explique Béatrice de La Boulaye, avant de se lancer dans une métaphore pâtissière qu’elle coupe net en rigolant : “Je vais passer à la mayonnaise (rire), mais pour que la mayonnaise prenne de plus en plus, je crois que j’ai faim en fait. Plus sérieusement, l’équipe ne fait que se renforcer.” Une belle recette, qui offre aux téléspectateurs une série de qualité, avec des personnages authentiques.
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Et si Béatrice de La Boulaye rêve de croissants à ce moment-là, elle n’aura droit qu’à des noix de cajou, ce qui fait beaucoup rire sa coéquipière. Les petits encas de servis, nous poursuivons la discussion avec ces deux personnages hauts en couleurs, sur le coaching qu’elles ont suivi pour la première saison pour trouver la rythmique du duo.
Une musique qui fonctionne
“Comme on ne se connaissait pas encore en tant que comédiennes, il a été nécessaire pour nous de trouver la bonne musique“, avoue Sonia Rolland. Pour cela, la production a fait appel à une coach pour qu’elle puisse travailler sur les deux univers des actrices pour tout harmoniser entre l’énergie totalement différente de Gaëlle Crivelli et celle de Mélissa Sainte Rose. “Il fallait trouver comment camper nos personnages sans se bouffer l’une et l’autre. Crivelli est sans limite, tout feu tout flamme et dans l’improvisation, que Béatrice peut assumer. Alors que moi, avec Mélissa, il n’y a pas d’improvisation, c’est du cadre tout le temps.” Un cadre que Sonia Rolland laisse loin derrière elle, une fois les caméras éteintes : “Ce n’est pas moi dans la vie (rire), mais ce cadre est nécessaire pour avancer dans l’intrigue.” Mélissa est sérieuse, il n’y a pas de doute, mais elle a aussi son humour, que Béatrice de La Boulaye décrit de “plus vache” (rire).
Deux caractères opposés, mais qui finalement donnent ce ton que l’on aime, cette ambiance parfois électrique où les piques entre les flics aiment à valser. Une musique qu’elles ont réussi à trouver saison après saison, avec deux personnages qui ne cessent de prendre de l’ampleur.
“À chaque fois on creuse et on va de plus en plus dans leur intimité“, souligne Béatrice de La Boulaye. La comédienne se plait dans cette fluidité qui s’est installée au fil des années : elles perdent moins de temps dans leurs recherches, elles ont leurs repères, leurs stylismes. “Moi j’ai une coiffure qui évolue“, s’amuse Béatrice de La Boulaye. La comédienne voit “Tropiques Criminels” comme une école, où elles apprennent continuellement, avec de nouveaux réalisateurs pour chaque saison : “On explore des nouvelles parties et c’est vraiment génial.”
En parlant d’explorer, les comédiennes ne cachent pas qu’elles aimeraient parfois se glisser dans la peau du personnage de l’autre, pour découvrir de nouvelles facettes de leur jeu ou parfois même se dépasser.
S’envier l’une et l’autre
“Je suis jalouse de cette collection d’hommes de Crivelli “, plaisante Sonia Rolland, avant de répondre plus sérieusement : “J’aime le côté sortie de route du personnage de Béa. En tant que comédienne, ce sont des choses que l’on aime aborder dans le jeu.” Néanmoins, la trame scénaristique de Mélissa en est tout aussi alléchante et ne déplaît pas à Béatrice de la Boulaye : “Les auteurs mettent Mélissa toujours en danger, c’est une James Bond Girl : elle se bat, elle est enlevée, on lui donne des drogues sans qu’elle ne soit au courant… elle vit des choses super intenses et c’est quand même hyper bien à jouer.“
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Puis, Béatrice de la Boulaye prend un ton quelque peu envieux d’une caractéristique de Mélissa, qui lui tiendrait à cœur d’expérimenter : “Elle a ce côté glam, que mon personnage a beaucoup moins.” La comédienne rigole d’elle-même, ou du moins de Crivelli et se lance dans la description d’une scène diffusée prochainement dans la saison 3. Au risque de spoiler je ne retranscrirai que la fin de cette longue tirade, qui n’était qu’un bonheur à écouter, tant Béatrice de la Boulaye à ce don pour raconter les anecdotes avec beaucoup d’humour : “Je me dis cool, j’ai une scène un peu glam comme Sonia. Je joue la scène, mais en même temps c’est Crivelli qui prend une douche, donc je ne fais pas Tahiti douche. Je chantonne, et je suis un peu curieuse de voir le résultat. Je demande au réal si je peux voir. Le résultat ? On voit mes fesses, avec une pauvre marque de maillot blanche et zéro glam.“
On a perdu Sonia Rolland, qui ne peut s’arrêter de rire. De mon côté, en reprenant mes esprits, je rassure Béatrice de la Boulaye. Crivelli aussi a eu droit à ses moments de séductrice : avec son beau short en jean et sa posture contre la voiture, ou encore lorsqu’elle est en WonderWoman. Mais Béatrice de La Boulaye ne perd pas espoir et compte bien demander aux auteurs de faire d’elle “une fille super glamour“. Si saison 5 il y a, aura-t-on une nouvelle Crivelli à la chevelure longue et sensuelle ? Il faudra patienter pour avoir une réponse, mais nous pouvons d’ores et déjà, lancer les paris.
Si elles n’ont pas la même sensualité, leurs personnages ont un point commun : elles sont des femmes libres.
Une série moderne
Il est rare (et triste de le faire remarquer) de voir à l’écran un duo de flics femmes. S’il est un fait que les duos féminins se multiplient, Sonia Rolland et Béatrice de la Boulaye restent à ce jour, le seul duo flics féminins de France Télévisions.
Fort heureusement, la série ne le revendique à aucun moment. Les téléspectateurs voient en effet deux femmes, mais surtout deux flics qui font leur job. “Ce sont des métiers qui paraissent opaques, inaccessibles pour les femmes et très masculins. Grâce à nos personnages, on déconstruit cette image et tous les clichés. On montre des femmes bien dans leur époque et sans complexe sur aucun sujet qu’ils soient féministes ou sexistes“, explique Sonia Rolland.
Mélissa Sainte Rose et Gaëlle Crivelli auraient pu être des rôles pour des hommes, comme l’a fait remarquer Béatrice de La Boulaye : “Ce n’était pas surligné que c’étaient des femmes. Ce ne sont pas des rôles de femmes par rapport à des hommes.” Si l’on observe de plus près Crivelli n’a-t-elle pas toutes les caractéristiques d’un homme ou du moins d’une certaine catégorie d’hommes (ne les mettons pas tous dans le même sac) : libre, sans attache, qui ne veulent pas d’enfant avec un boulot de terrain.
L’ironie, est que ces réflexions autour de la femme et de sa place ont été écrites par trois hommes. Trois hommes qui ont su offrir à la télévision un vent de fraîcheur, avec des femmes actuelles et modernes. Deux façons de penser, d’être, d’agir, auxquelles les téléspectatrices peuvent s’identifier : il y aura celles proches de Crivelli, celles proches de Mélissa et celles qui se retrouveront dans les deux. Deux états d’esprit féminins recherchés par les actrices : “Le personnage de Mélissa c’est ce que je recherchais. Elle me permet cette liberté que j’ai dans ma vie quotidienne et de pouvoir la vivre même à travers mon personnage. Je ne voulais plus être dans des personnages étriqués, moralistes ou un peu vieux jeux, avec une image un peu vieillotte qui n’est même pas en lien avec notre époque.“
Au-delà des enquêtes, “Tropiques Criminels” est une série qu’il est indispensable de regarder. Et les comédiennes insistent : “C’est une série qui instruit et qui divertit en même temps, elle est chouette et pleines de valeurs.” Un programme offrant un bel éventail de la femme : la flic, la mère de famille, l’amante, la femme libre… Une série qui amène à de nombreuses réflexions sur le choix de la maternité, sur ce qu’est la féminité aujourd’hui, être une maman célibataire, les problématiques autour de l’adolescence…
Des auteurs qui savent se nourrir des turbulences de l’époque pour nourrir l’univers des personnages de Sonia Rolland et Béatrice de La Boulaye. Ce sont aussi deux actrices qui ont su apporter toute cette authenticité à Mélissa et Gaëlle Crivelli, en prenant le temps de les comprendre pour s’ouvrir elles-mêmes à notre époque et s’imposer en tant que femmes, en tant que comédiennes à suivre. Elles donnent ainsi l’espoir aux nouvelles générations d’actrices que la télévision peut changer, évoluer et offrir de jolis rôles.
Une interview rock’n’roll, avec deux femmes emplies d’humour. Discuter avec Sonia Rolland et Béatrice de la Boulaye, c’est passer un moment suspendu dans le temps, où l’on oublie tout, on lâche prise et on rit avec elles. Pour finir sur une petite note légère, Béatrice de la Boulaye et Sonia Rolland ont certifié que : “On a rajeuni notre public et nous aussi (rire). Cette série est une jouvence. Regardez la série, vous allez rajeunir avec nous.” En plus d’être drôles, elles sont visiblement bien plus efficaces qu’une crème anti-ride.