Michael Cohen : un acteur qui joue et qui écrit pour apprendre sur le monde

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Crédit Photo : Robertino

On pourrait passer des heures au téléphone avec Michael Cohen, tant par sa voix suave, sa douceur que pour sa culture, sa manière captivante de raconter les choses avec passion et admiration. Un enfant timide devenu l’un des plus grands comédiens français, qui l’aurait cru lui qui vient d’un milieu dans lequel ce métier était “inconnu”. Mais Michael Cohen s’est fait confiance et quoi de mieux pour réaliser ses rêves. Rencontre. 

Adolescent pas très bien dans sa peau, c’est à 13 ans qu’il ose se dire qu’il sera acteur. “J’ai eu une sorte de révélation, comme quand le curé décide qu’il sera curé, il ne sait pas pourquoi ça lui tombe dessus.” Mais est-ce vraiment un hasard ? Lui qui passe des heures à regarder des films ou à se rendre au cinéma pour rêver devant du Truffaut ou du Sautet. Des films pas vraiment de son âge, car au-delà du rêve il veut comprendre la vie. “Ce sont des films dits pour adultes, mais ils me parlaient, m’apaisaient, me rassuraient, me conseillaient…

 
 
 
 
 
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Déterminé à devenir un grand comme Yves Montand, Alain Delon, Jean-Paul Belmondo ou encore Jean Gabin… il se donne pour mission d’intégrer les cours Florent et sera admis. Une des plus grandes écoles de théâtre où il fait une rencontre qui va changer son destin, celle de Francis Huster

Les premiers pas sur les planches 

Francis Huster était son professeur dans la classe libre. Le comédien ne peut passer à côté de cet élève brillant et lui propose de jouer dans la pièce “Putzi” . “J’avais 21 ans et tout à coup on a l’impression que l’on est accepté par le métier, par quelqu’un que l’on admire, qui est votre professeur.” En plus d’être un grand nom du théâtre Français, Michael Cohen décrit un professeur bienveillant, qui connait chacun de ses élèves, mais surtout qui l’a révélé. En effet, après cette première grande expérience en tant que comédien confirmé, Michael Cohen enchainera les rôles sur les planches, mais aussi au cinéma. Une double casquette qui lui offre cette palette de jeu infinie. 

Michael Cohen fait partie de ces comédiens non cantonnés à un seul et même rôle. Une différence qu’il doit au théâtre car pour lui, il permet d’être beaucoup plus libre. “On peut davantage changer de peau, de voix, de tête… au cinéma et à la télévision c’est plus compliqué car effectivement on nous donne à peu près les mêmes rôles et c’est rare de faire des grosses compositions à l’américaine, en France on aime pas trop ça.

 
 
 
 
 
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Le comédien aime jouer, mais surtout il aime découvrir un personnage, un univers, un métier qu’il ne fera sans doute jamais… il plonge dans ses personnages pour offrir une belle interprétation au public, mais également une occasion pour lui d’apprendre. “Pour la pièce de théâtre La Mouette, mise en scène par Isabelle Nanty, elle voulait que je joue en direct un morceau de Chopin. J’ai appris ce morceau alors que je ne sais pas jouer au piano et que je ne sais rien jouer d’autre. Mais je trouve ça passionnant d’aller apprendre, chercher de nouvelles choses… c’est ça aussi qui me motive dans mes choix, le fait d’explorer des mondes que je ne connais pas et me donner à corps perdu dedans.

Quand Michael Cohen joue, il veut se servir de toutes ces émotions qu’il a pu ressentir au plus profond de lui. Il voit l’art comme un remède pouvant apaiser les gens, les guider parfois à trouver des réponses à des questions. “J’aime l’art comme une sorte de médecine douce… Je ne sais pas si la culture peu sauver le monde, mais en tout cas, elle peut aider le monde.” 

Si à travers ses personnages il tente d’apaiser certains maux, il le fait aussi par le biais des mots. 

“Écrire pour exister

Acteur, Michael Cohen est aussi écrivain. Une passion qui débute très tôt par cette peur incessante qu’on ne vienne pas le chercher. “Il y avait tellement de monde, que très vite je me suis dis que j’allais écrire mes pièces. Je ne sais pas d’où vient cette aptitude à écrire, car je n’étais pas très fort à l’école.” Une chose est sûre, il aime et sait écrire des pièces, des dialogues, des situations… Une qualité qui se fera vite remarquer aux cours Florent. Il prend confiance en lui, laissant sa plume écrire encore et encore des scénarios, des romans… “L’écriture est importante, car devenir comédien est un métier difficile. Il y a des périodes très calmes où l’on a moins de propositions…”  Des périodes compliquées à vivre, quand on a soif de nouvelles aventures. Michael Cohen n’est pas du genre à se morfondre, alors il écrit faisant ressortir de nouvelles choses ancrées en lui. 

Écrire ses propres histoires, c’est pouvoir raconter ce qu’il observe, ce qu’il entend, sans être au service d’un scénario d’autrui. “Depuis que je fais ce métier, l’écriture m’a toujours accompagnée. Je suis un acteur qui écrit, mais le processus est le même, c’est un désir de raconter quelque chose du monde qui m’entoure.

Avec la sortie de son troisième roman, intitulé “L’attraction du désordre” Michael Cohen compte faire voyager ses personnages encore bien longtemps. En effet, tout comme l’un de ses ouvrages baptisé “Ça commence par la fin”,  il m’annonce qu’il adaptera ce dernier à l’écran. Il faudra tout de même attendre un petit moment, pour que vous soyez nombreux à dévorer les pages avant de pouvoir rencontrer ces personnes imaginaires. 

 
 
 
 
 
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J’aime que les lecteurs s’imaginent leurs propres personnages, qu’ils s’imaginent les têtes qu’ils veulent. Le cinéma ça marque et on a du mal par la suite à lire le livre.” Adapter ses romans, c’est aussi une façon de continuer à vivre avec ses personnages, de ne pas les quitter et leur faire vire d’autres choses qui ne sont pas dans le livre. Un peu comme il le fait avec ses camarades de jeu dans “Bungalow 21”. Yves Montand, Simone Signoret, Arthur Miller ou encore Marilyn Monroe ne sont plus de ce monde, mais grâce à Michael Cohen, Mathilde Seigner, Emmanuelle Seigner et Vincent Winterhalter, ils continuent à être éternel.

L’admiration d’un comédien pour un autre 

Lorsque le metteur en scène Jérémie Lippman, pense à Michael Cohen pour interpréter Yves Montand, le comédien a quelque peu la pression de se glisser dans la peau de ce grand showman et acteur. “J’ai fait une première lecture seulement avec Mathilde qui s’est pas trop mal passée.” Alors que d’autres acteurs sont en lice, ils le rappellent pour une deuxième lecture avec la présence cette fois-ci d’Emmanuelle Seigner. Accompagné des deux soeurs, Michael Cohen sent cette osmose qui s’installe, une alchimie palpitante. Pour la réponse l’attente est longue… deux mois seulement après le casting Michael Cohen reçoit enfin une réponse positive. Mais le comédien ne s’est pas roulé les pouces, car même avant de savoir s’il était pris ou non, il a appris la pièce par coeur. “C’est la première fois de ma vie que j’ai commencé à travailler un rôle avant même de savoir si j’étais pris. Mais je ne sais pas, je savais que j’allais avoir ce rendez-vous avec cette pièce et ce personnage.

Yves Montand n’a plus vraiment de secrets pour Michael Cohen sauf les plus intimes… Il connait tous ses films, a vu tous les documentaires à son sujet, visionné nombreux de ses shows et lu beaucoup de choses autour de lui. “Je l’ai joué avec ce que je ressentais, tout en le raccordant avec moi. J’ai tenté de faire un mi-chemin avec un personnage qui lui ressemble et me ressemble.” Il est hors de question pour l’acteur de le copier, l’imiter par peur de tomber dans une certaine caricature. Ainsi, sur scène, cela donne un personnage authentique, dans lequel on reconnaît Yves Montand dans sa gestuelle, ses mimiques, sa façon de parler. Un homme à la fois macho tout en étant enfantin, sans oublier ses côtés à la fois généreux et égoïstes.” J’aime bien toutes les contradictions qu’il a en lui.

 
 
 
 
 
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Mais “Bungalow 21”, ne sera en 2023 pas aux goûts de tout le monde, notamment aux féministes… La pièce mène presque à pardonner Yves Montand d’avoir trompé Simone Signoret avec Marilyn Monroe. Une Marilyn dépeinte comme un sex symbol perdue dans ses démons. Mais à t-on besoin d’en faire une pièce moderne et féministe ? N’est-ce pas au public de re-contextualiser ce pan de l’histoire de ces grandes stars du cinéma à une période donnée ? 

Liaison dangereuse 

En tant qu’acteur on ne juge pas nos personnages. On essaie de les comprendre, ça ne veut pas dire excuser, mais qu’il y ait une raison. Quand on joue un personnage on doit avoir de l’empathie pour lui et ne pas le juger. Il y a le contexte de l’époque, on est dans les années 1960. Quand on voit comment en dix ans la société a évolué, on ne peut pas vraiment comparer avec les années 1960…” Et en même temps, la tromperie conjugale n’est-elle pas toujours présente au 21e siècle ? Alors peut-on vraiment pointer du doigt Yves Montand, outre que leur histoire avec Simone Signoret a été rendue publique, humiliant ainsi l’actrice lors des faits. Voilà la seule différence. “Je ne vois pas comment on peut juger un homme qui trompe sa femme, tout le monde peut avoir cette tentation, ce vertige. Puis on est avec des gens extraordinaires, qui vivent une situation un peu ordinaire, mais ce qui est beau dans cette pièce, c’est que l’on a quatre icônes mondiales qui vont se retrouver voisins de bungalow  à manger des pâtes à refaire le monde parler de tout, de rien… à vivre comme des adolescents alors qu’ à ce moment-là ce sont les plus grandes stars du monde.

Entre ces quatre personnages des liens se tissent : Simone et Marilyn deviennent comme des soeurs, Simone et Arthur Miller se retrouvent intellectuellement, Yves Montand admire la beauté de Marilyn, Marilyn cherche de l’affection auprès de Yves Montand… Des liens forts et beaux, mais dangereux.  Simone Signoret doit quitter le bingalow pour un film en Italie, il en est de même pour Arthur Miller qui se doit de rentrer pour écrire son prochain film. Ainsi, ils laissent deux âmes perdues ensemble. 

 
 
 
 
 
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Yves Montand qui a vécu une enfance pauvre, vie en 1960 un rêve hollywoodien. Marilyn livrée à elle même depuis sa tendre enfance à ce besoin de reconnaissance. Cet abandon les rapprochera, un peu trop. “Pour Yves Montand, c’est comme un enfant qui tout à coup réalise un rêve : avoir une aventure avec la plus belle femme du monde, la plus grande star du monde, celle que tous les hommes rêvent d’avoir. Elle, elle ne voulait pas forcément coucher avec lui, elle voulait juste être rassurée par lui.” Une histoire de coucherie certes, mais c’est avant tout l’histoire de ces deux êtres qui ont vécu une passion pour se rendre heureux à un moment donné , mais qui fera du mal à d’autres. 

Une pièce que je ne peux que vous recommander, surtout pour les grands passionnés de ces quatre icônes ! 

Une longue conversation qui se termine par un petit mot de Michael Cohen pour les jeunes qui rêvent de cinéma:  “Ce que j’aime dans mon métier, c’est le côté artisan, on travaille beaucoup. La route est longue, elle est parfois difficile à tenir. Personne d’autres que vous doit croire en vous. Souvent on fait ce métier parce qu’on a pas assez confiance en nous et que l’on est timide… c’est un paradoxe entre un moment de confiance et un désir d’être aimé. En même temps, il n’y a que nous pour nous faire confiance pour continuer car personne nous attends, personne à la base ne veut de nous et il faut avoir confiance en soit, ne rien lâcher et même quand ça commence à marcher, se dire qu’il faut continuer à travailler. Ça fait longtemps que je fais ce métier et j’en ai vu des copains et des copines exploser en plein vol et ne pas réussir à gérer  la pression du métier. C’est un métier qui fait beaucoup rêver, mais qui peut se transformer en cauchemar. Il faut être solide. Tant que ça reste votre passion et tant que vous aimez ça, c’est que vous êtes invincible. Mais le jour où vous commencez à ne plus aimer et à trop souffrir de la difficulté de la réalité du métier, il vaut mieux arrêter. Pour l’instant je suis toujours aussi heureux et passionné et c’est une chance car ça peut partir.

Pour le bonheur du cinéma et du théâtre, espérons que Michael Cohen continue de longues années à rester passionné…