The Normal Heart : l’histoire d’une génération terrassée par le sida

The Normal Heart, Larry Kramer, Virginie de la Clausade, Théâtre, PressEyes, Mathilde Dandeu

Les comédiens de la pièce The Normal Heart

Écrite en 1985 par Larry Kramer, “The Normal Heart” est une oeuvre autobiographique, dans laquelle l’auteur livre son combat contre l’homophobie mais surtout sa lutte pour que la pandémie liée au sida soit prise en compte. Il l’adaptera sur scène à Broadway comme un acte militant pour réveiller les consciences. Mais il faudra attendre 36 longues années, pour que la pièce soit créée en France, à Paris grâce à Virginie de Clausade. 

Déchirant et sensationnel, sont peut-être les deux mots qui viennent à l’esprit quand sonne la fin de la pièce “The Normal Heart”, mise en scène par Virginie de Clausade. Adaptée de l’oeuvre autobiographie de Larry Kramer, écrite en 1985, soit deux ans seulement après la découverte du virus, alors qu’il n’existait aucun traitement, “The Normal Heart” met en lumière le combat de Ned Weeks. Écrivain, il se battra pour faire entendre la communauté gay face à la maladie. Depuis le début de la pandémie, ses amis meurent un à un dans de terribles souffrances et conditions, comme le relève si bien le texte notamment dans une tirade de Bruce Niles, interprété par Andy Gillet. Le spectateur est à la fois submergé par l’émotion et par une vive colère. 1985 semble loin et en même temps c’était hier. 

“The Normal Heart” est une réelle prise de conscience sur ce que ces hommes et ces femmes ont dû endurer, face à une société homophobe qu’il les considérait comme des fous, des gens pas comme les autres. Des caractéristiques soulignées par le frère de Ned Weeks. Ben Weeks aime son cadet, beaucoup même, mais ce n’est pas un homme comme lui. Un constat accablant, presque impensable et pourtant c’est dans cette réalité qu’ils se sont battus pour faire avancer les mentalités, afin de vivre librement et se faire soigner du sida. 

Bousculer les codes 

La pièce de Virginie de Clausade s’ouvre sur une partie du groupe d’amis de Ned Weeks. Greg (Joss Berlioux) attend ses résultats, il panique à l’idée d’avoir ce virus qui a déjà causé de nombreuses pertes. La sentence tombe… Greg n’a plus que quelques mois. Au fil des actes, c’est la voix de Justine Fraioli qui résonne pour donner le nombre de recensements à chaque période importante de Ned Weeks, incarné par Dimitri Storoge. 

 
 
 
 
 
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Ned Weeks est comme le double de Larry Kramer. Il est le personnage qui sonne l’alerte, jugée trop tôt pour son cercle d’amis. Mais Ned Weeks, très caractériel et intransigeant a dû mal à rester les bras croisés et voir sa communauté s’éteindre à petit feu dans la plus grande indifférence. Il se donne corps et âmes pour mener des actions coup de poing. Lui qui est vu non conforme par la société, ne cherche pas de conformité dans ses actions. Il veut agir et vite. Une lutte dans laquelle il se sent parfois seul. Il agit par pulsion, quand ses amis veulent un combat réfléchit avec des compromis mis en place par les plus haut placés. Mais très vite, la pièce met en évidence : quel que soit le combat mené, ils vont devoir avancer seuls pour se faire entendre. 

L’amour criminel 

L’homosexualité est vue comme un “crime“. Les politiciens s’en cachent et certains amis de Ned Weeks, aux fonctions importantes, ne veulent pas la révéler peur d’être renvoyés. “The Normal Heart” est une remise en question sur la condition d’être homosexuel dans les années 1980. La pièce affirme ainsi, que si les hétérosexuels avaient été touchés en premier par le sida, les recherches se seraient accélérées. Une vérité atterrante, mais que l’on peut nier. 

 
 
 
 
 
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Le comportement pusillanime de ses amis, désespère Ned Weeks. Heureusement, il pourra compter sur le soutient du Dr Brookner jouée ici par Deborah Grall. Elle qui n’a pas sa langue dans sa poche, se bat à leur côté pour que la maladie soit prise en considération. Chaque jour, elle voit des hommes mourir seuls sans aucun soin, tant le personnel soignant à peur de les toucher pour ne pas être à leur tour contaminé. Elle essaie de convaincre Ned et tous les autres d’arrêter leurs rapports sexuels, une idée que refuse la bande d’amis. Eux qui ont réussi à se libérer par le sexe, une arme presque militante pour s’imposer. 

Une pièce dramatique, jouée dans un décors unique mais qui n’a pas vraiment d’importance tant la prouesse des acteurs prime sur scène. Les cris et les larmes ne sont jamais surjoués. Ils sont le résultat d’hommes impuissants, qui déversent leur colère et leur douleur. Néanmoins, le texte laisse des moments de répit, où le spectateur happé par toute cette souffrance, peut souffler et rire. 

Au-delà de son enjeu historique et politique aidant à mieux comprendre ce que la communauté gay à pu subir pour obtenir des droits, “The Normal Heart” est une ode à l’amitié et à l’amour.