Seize Printemps : de l’amour passionnel à l’ivresse de vivre

Suzanne Lindon, Arnaud Valois, Seize Printemps

Crédit Photo : 2020 Avenue B Productions

Labellisé à Cannes 2020, “Seize Printemps“ est le premier film écrit, réalisé et joué par Suzanne Lindon. Une ode à l’amour et plus particulièrement à celui des premiers amours de jeunesse. Une œuvre qui est à la fois bouleversante, touchante et tout simplement sublime.

Suzanne a 16 ans, elle est un peu à part de toutes les filles de son âge. Non pas qu’elles la mettent de côté, bien au contraire. Mais Suzanne s’ennuie avec les gens de son lycée. Pourtant, elle se force un peu, mais rien n’y fait. Si ses copines se déhanchent sur la piste de danse, Suzanne marche le long de la pièce et les regarde en souriant. Mais Suzanne pense, beaucoup, et surtout à cet homme Raphaël. Comédien lui aussi, il est comme elle, il s’ennuie, non pas de ses amis, mais de jouer depuis des mois la même scène. 

La caméra suit les pas de l’adolescente, elle est au centre de l’image. Rien de ses émotions n’échappe au spectateur, on pourrait presque lire dans ses pensées. Suzanne n’est pas une adolescente turbulente, bien au contraire. Elle est douce, curieuse et n’hésite à poser des questions à ses parents. Des questions auxquelles ils se retrouvent parfois désarmés. Des points d’interrogation qui soulignent toute la complexité des adolescents et de leurs mystérieuses pensées. Une relation parent/enfant, qui apporte au film une pointe d’humour, de cette jeune fille qui tente de comprendre l’homme dont elle est tombée amoureuse.

À travers Raphaël, on retrouve l’adolescente qu’elle est. Elle connaît son emploi du temps par cœur, se met à lire du théâtre, et va même demander à sa maman de lui préparer une tartine de confiture à la fraise, comme le fait son amant tous les matins.

La poésie des corps

Lui tombe peu à peu amoureux de la maladresse de cette jeune fille, de sa timidité et peut-être même de ses silences qu’elle laisse planer. Peu à peu la caméra ne filme plus Suzanne, mais s’intéresse à ce comédien un peu perdu. Il l’attend à sa fenêtre, mais ce jour-là Suzanne ne viendra pas. Si les silences et les regards des premiers jours évoquaient leur amour,  Suzanne commence à s’ennuyer dans cette relation. Elle est ailleurs, mais n’est plus avec lui. Il est ailleurs, mais n’est plus avec elle. Peu à peu leur amour s’essouffle, leurs regards sont vides, dénués de passion, les étoiles se sont envolées.

L’ histoire d’amour est rythmée par la musique faisant écho aux états d’âme de ce couple. Leurs émotions se traduisent également par la danse permettant aux personnages d’exprimer ce qu’ils ressentent : la joie d’une première invitation, le corps d’une adolescente qui se laisse envahir par ses envies, la tentation de se toucher à ce premier rend-vous et la pulsion de ces deux corps qui succombent à ce désir de ne faire qu’un.

Porté par Suzanne Lindon et Arnaud Valois, ils donnent à “Seize Printemps“, un véritable charme intemporel. Tout comme cette décoration minimaliste qui reflète la poésie de la relation entre Suzanne et Raphaël : le chemin qui mène au lycée, la place Charles Dullin à Montmartre avec son théâtre de l’atelier, et la terrasse du café voisin, qui sont les symboles de cet amour qui tourne en rond, tout comme ces deux êtres excédés par leur routine du quotidien.

L’amour est apporté avec beaucoup de poésie et de délicatesse. Si “Seize Printemps“ donne presque envie de retomber amoureux, Suzanne Lindon, ne cache pas que l’on peut aussi en souffrir…